NEWSLETTER JANVIER 2022

NEWSLETTER JANVIER 2022

  • Droit du travail français et européen
  • Droit des affaires et droit commercial

  • Droit du travail

    Obligation de sécurité – Préjudice d’anxiété.
    Cass., Soc., 15 décembre 2021, n° 20-11046.

    https://juricaf.org/arret/FRANCE-COURDECASSATION-20211215-2011046

    Le point de départ du délai de prescription de l’action par laquelle un salarié demande à son employeur, auquel il reproche un manquement à son obligation de sécurité, réparation de son préjudice d’anxiété, est la date à laquelle le salarié a eu connaissance du risque élevé de développer une pathologie grave résultant de son exposition à l’amiante. Ce point de départ ne peut être antérieur à la date à laquelle cette exposition a pris fin.

    En application des règles de droit commun régissant l’obligation de sécurité de l’employeur, le salarié qui justifie d’une exposition à l’amiante, générant un risque élevé de développer une pathologie grave, peut agir contre son employeur pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité.

    Le salarié doit justifier d’un préjudice d’anxiété personnellement subi résultant d’un tel risque.

    Le préjudice d’anxiété, qui ne résulte pas de la seule exposition au risque créé par une substance nocive ou toxique, est constitué par les troubles psychologiques qu’engendre la connaissance du risque élevé de développer une pathologie grave par les salariés.

    Contrat d’accompagnement dans l’emploi – Durée hebdomadaire.
    Cass., Soc., 15 décembre 2021, n°19-14017.

    https://juricaf.org/arret/FRANCE-COURDECASSATION-20211215-1914017

    Aux termes de l’article L. 5134-26 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-1189 du 26 octobre 2012, la durée hebdomadaire du travail du titulaire d’un contrat d’accompagnement dans l’emploi ne peut être inférieure à vingt heures, sauf lorsque la décision d’attribution de l’aide le prévoit en vue de répondre aux difficultés particulièrement importantes de l’intéressé. Lorsque le contrat de travail, associé à l’attribution d’une aide à l’insertion professionnelle accordée au titre d’un contrat d’accompagnement dans l’emploi, a été conclu pour une durée déterminée avec une collectivité territoriale ou une autre personne de droit public, la durée hebdomadaire du travail peut varier sur tout ou partie de la période couverte par le contrat, sans être supérieure à la durée légale hebdomadaire. Cette variation est sans incidence sur le calcul de la rémunération due au salarié.

    Selon l’article R. 5134-36 du code du travail, en application de l’article L. 5134-26 pour le calcul de la rémunération, le nombre d’heures hebdomadaires de travail accomplies est réputé égal à la durée du travail contractuelle. Le programme prévisionnel de la répartition de la durée du travail sur l’année ou sur la période couverte par le contrat de travail est indiqué dans le contrat de travail.

    Contrat de travail – Rupture.
    Cass., Soc., 15 décembre 2021, n°15-24990.

    https://juricaf.org/arret/FRANCE-COURDECASSATION-20211215-1524990

    Aux termes de l’article L. 1235-2 du code du travail dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017, si le licenciement d’un salarié survient sans que la procédure requise ait été observée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge impose à l’employeur d’accomplir la procédure prévue et accorde au salarié, à la charge de l’employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.

    Il résulte de ces dispositions que l’indemnité prévue par ce texte ne peut être allouée que lorsque le contrat de travail a été rompu par un licenciement.

    Contrat de travail – Exécution.
    Cass., Soc., 15 décembre 2021, n° 20-18782.

    https://juricaf.org/arret/FRANCE-COURDECASSATION-20211215-2018782

    Selon l’article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018, si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse et si l’une ou l’autre des parties refuse la réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux exprimés en mois de salaire brut.

    Aux termes de l’article L. 1226-2-1, alinéa 1er, du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 du second de ces textes, lorsqu’il est impossible à l’employeur de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s’opposent à son reclassement.

    Il résulte de leur combinaison que l’indemnité en réparation du préjudice subi du fait de l’absence de notification écrite des motifs qui s’opposent au reclassement et l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne se cumulent pas.

    Contrat de travail – Rémunération.
    Cass., Soc., 15 décembre 2021, n° 19-20978.

    https://juricaf.org/arret/FRANCE-COURDECASSATION-20211215-1920978

    Aux termes de l’article 1315, devenu 1353, du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

    Ainsi, la cour d’appel, qui a constaté que l’employeur ne produisait aucun élément de nature à établir que les objectifs qu’il avait fixés au salarié pour l’année 2013 étaient réalisables, a, sans inverser la charge de la preuve, décidé à bon droit que la rémunération variable au titre de cet exercice était due.

    Procédant ensuite à l’interprétation, exclusive de dénaturation, du contrat de travail, rendue nécessaire par l’ambiguïté de ses termes, la cour d’appel a estimé que les objectifs avaient été fixés dans l’annexe 1 au contrat de travail, pour la seule année 2013, sans reconduction possible pour les années suivantes.

    Statut collectif du travail – Transport routier.
    Cass., Soc., 15 décembre 2021, n°20-16175.

    https://juricaf.org/arret/FRANCE-COURDECASSATION-20211215-2016175

    M. [L] a été engagé le 14 avril 2010 par la société Ambulances Ovilloise en qualité d’ambulancier.

    La convention collective applicable à la relation de travail est la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950.

    Le 8 novembre 2013, le salarié a saisi la juridiction prud’homale d’une demande de résiliation du contrat de travail et de demandes relatives à son exécution et sa rupture.

    Il a été licencié le 17 janvier 2014.

    L’article 1er de la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires de transport du 21 décembre 1950 précise que, destinée à régler les rapports entre les employeurs et salariés, elle s’applique aux entreprises relevant de l’une des activités énumérées par référence à la nomenclature d’activité française -NAF- adaptée de la nomenclature d’activité européenne -NACE- et approuvée par le décret n° 92-1129 du 2 octobre 1992 au nombre desquelles figurent les transports routiers réguliers de voyageurs (60-2 B), les autres transports routiers de voyageurs (60-2 G) et les ambulances (85-1 J).

    L’article 24 de la même convention prévoit que des conventions annexes, fixant les conditions particulières de travail, seront établies pour certaines catégories de personnel qu’il énonce. Il ajoute qu’en complément de ces conventions annexes, des protocoles et accords spécifiques pourront être établis dans des domaines d’application particuliers ou pour tenir compte des spécificités de certaines activités ou de certains métiers.

    C’est ainsi que l’article 1 de l’accord ARTT du 18 avril 2002 précise qu’il s’applique aux entreprises de transport routier de voyageurs relevant de la convention collective nationale des transports routiers et des activités auxiliaires du transport.

    La cour d’appel, après avoir rappelé les dispositions conventionnelles, a exactement retenu que les ambulances ne pouvaient pas être considérées comme une activité de transport routier de voyageurs au sens de la convention collective et que le salarié, ambulancier, employé par une entreprise de transport sanitaire, ne relevait pas de l’accord du 18 avril 2002 en sorte qu’il était mal fondé à réclamer le bénéfice du treizième mois conventionnel prévu par ce texte.

    Durée et Réglementation du travail.
    Cass., Soc., 8 décembre 2021, n° 20-14178.

    https://juricaf.org/arret/FRANCE-COURDECASSATION-20211208-2014178

    Selon l’article 8 du règlement (CE) n° 593/2008, du Parlement européen et du Conseil, du 17 juin 2008, sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I), le contrat individuel de travail est régi par la loi choisie par les parties conformément à l’article 3. Ce choix ne peut avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions auxquelles il ne peut être dérogé par accord en vertu de la loi qui, à défaut de choix, aurait été applicable selon les paragraphes 2, 3 et 4 de cet article. Selon ce paragraphe 2, à défaut de choix exercé par les parties, le contrat individuel de travail est régi par la loi du pays dans lequel ou, à défaut, à partir duquel le travailleur, en exécution du contrat, accomplit habituellement son travail. Aux termes du paragraphe 3, si la loi applicable ne peut être déterminée sur la base du paragraphe 2, le contrat est régi par la loi du pays dans lequel est situé l’établissement qui a embauché le travailleur. Aux termes du paragraphe 4 de cet article, s’il résulte de l’ensemble des circonstances que le contrat présente des liens plus étroits avec un autre pays que celui visé au paragraphe 2 ou 3, la loi de cet autre pays s’applique.

    Aux termes de l’article 9, § 1, du même règlement, une loi de police est une disposition impérative dont le respect est jugé crucial par un pays pour la sauvegarde de ses intérêts publics, tels que son organisation politique, sociale ou économique, au point d’en exiger l’application à toute situation entrant dans son champ d’application, quelle que soit par ailleurs la loi applicable au contrat d’après ce règlement.

    Selon l’article 9, § 2, du règlement n° 593/2008, les dispositions de celui-ci ne pourront porter atteinte à l’application des lois de police du juge saisi.

    Selon l’article 3, § 1, de la directive 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 1996, concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services, les États membres veillent à ce que, quelle que soit la loi applicable à la relation de travail, les entreprises établies dans un État membre qui, dans le cadre d’une prestation de services transnationale, détachent des travailleurs, conformément à l’article 1er, § 3, de cette directive, sur le territoire d’un État membre garantissent aux travailleurs détachés sur leur territoire les conditions de travail et d’emploi concernant les périodes maximales de travail et les périodes minimales de repos, la durée minimale des congés annuels payés, ainsi que les taux de salaire minimal, y compris ceux majorés pour les heures supplémentaires qui, dans l’État membre sur le territoire duquel le travail est exécuté, sont fixées par des dispositions législatives, réglementaires ou administratives et/ou par des conventions collectives.

    Conformément au considérant 34 du règlement n° 593/2008, la règle relative au contrat individuel de travail que ce dernier prévoit ne devrait pas porter atteinte à l’application des lois de police du pays de détachement, prévue par la directive 96/71.

    Pour condamner la société à payer au salarié certaines sommes à titre de dommages-intérêts en réparation de l’atteinte au repos, d’indemnité pour travail dissimulé, d’indemnité pour contrepartie obligatoire en repos, de rappel d’heures supplémentaires et de droits à congés payés afférents, l’arrêt retient que la législation sur la durée du travail est constitutive en France d’une loi de police.

    En statuant ainsi, alors que, en dehors des situations de détachement de travailleurs sur le territoire français, relevant de la directive 96/71, la législation française sur la durée du travail ne constitue pas une loi de police mais relève des dispositions auxquelles il ne peut être dérogé par accord au sens de l’article 8, § 1, du règlement n° 593/2008, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

    Contrats de travail – Modification.
    Cass., Soc., 8 décembre 2021, n° 20-13905.

    https://juricaf.org/arret/FRANCE-COURDECASSATION-20211208-2013905

    Selon l’article 1er, § 1, du règlement n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, ce dernier s’applique en matière civile et commerciale et quelle que soit la nature de la juridiction.

    Aux termes de l’article 1er, § 2, sous b), de ce règlement sont exclus de son application les faillites, concordats et autres procédures analogues.

    Aux termes de l’article 3, §1, du règlement n° 1346/2000 du Conseil, du 29 mai 2000, relatif aux procédures d’insolvabilité, les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel est situé le centre des intérêts principaux du débiteur sont compétentes pour ouvrir la procédure d’insolvabilité.

    Cette disposition attribue également une compétence internationale aux juridictions de l’État membre sur le territoire duquel a été ouverte la procédure d’insolvabilité pour connaître des actions qui dérivent directement de cette procédure et qui s’y insèrent étroitement (CJCE, arrêt du 12 février 2009, Seagon, C-339/07, points 21 et 22).

    Seules les actions qui dérivent directement d’une procédure d’insolvabilité et qui s’y insèrent étroitement sont exclues du champ d’application du règlement n° 44/2001. Par voie de conséquence, seules ces actions entrent dans le champ d’application du règlement n° 1346/2000 (CJUE, arrêt du 9 novembre 2017, [G] France et [G] Maschinenbau, C-641/16, point 19).

    S’agissant du premier critère, afin de déterminer si une action dérive directement d’une procédure d’insolvabilité, l’élément déterminant pour identifier le domaine dont relève une action est non pas le contexte procédural dans lequel s’inscrit cette action, mais le fondement juridique de cette dernière. Selon cette approche, il convient de rechercher si le droit ou l’obligation qui sert de base à l’action trouve sa source dans les règles communes du droit civil et commercial ou dans des règles dérogatoires, spécifiques aux procédures d’insolvabilité (CJUE, arrêt du 9 novembre 2017, [G] France et [G] Maschinenbau, C-641/16, point 22).

    Pour déclarer la juridiction prud’homale incompétente pour connaître de l’action tirée de la violation du droit au transfert du contrat de travail du salarié, l’arrêt retient, en premier lieu, que la matière du transfert du contrat de travail lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, telle qu’elle s’évince de l’article L. 1224-1 du code du travail, est équivalente à celle de la directive n° 2001/23/CE du Conseil, du 12 mars 2001, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d’entreprises, cette directive étant aussi d’effet direct au Royaume-Uni, en deuxième lieu, que la procédure collective d’« administration » de l’Insolvency Act 1986 qui régit la procédure anglaise du « pre-packaged administration », dans sa version applicable au litige, est visée à l’annexe A du règlement nº 1346/2000 et que cette annexe A a la même autorité que son règlement, en troisième lieu, que les articles 16 et 17 du règlement n° 1346/2000 imposent à tout État membre de reconnaître la décision d’ouverture d’une procédure d’insolvabilité dès que celle-ci produit ses effets dans l’État d’origine sans que puisse être vérifiée la compétence des juridictions de cet État, l’article 26 de ce règlement autorisant tout État membre à refuser de reconnaître une procédure d’insolvabilité ouverte dans un autre État membre ou d’exécuter une décision prise dans le cadre d’une telle procédure seulement lorsque cette reconnaissance ou cette exécution produirait des effets manifestement contraires à son ordre public, en particulier à ses principes fondamentaux ou aux droits et aux libertés individuelles garantis par sa Constitution et, en quatrième lieu, que l’action du salarié fondée sur la fraude à la loi anglaise ou aux règles de conflits de lois ou de juridictions en matière de transfert du contrat de travail dérive directement de la procédure d’insolvabilité du Royaume-Uni où est situé le centre des intérêts principaux des débiteurs et s’y insère étroitement.

    En statuant ainsi, alors que l’action du salarié était fondée sur l’article L. 1224-1 du code du travail prévoyant en cas de survenance d’une modification dans la situation juridique de l’employeur, la subsistance, entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise, de tous les contrats de travail en cours au jour de la modification, que le bénéfice de cette disposition ne requiert pas l’ouverture préalable d’une procédure d’insolvabilité au sens du règlement n° 1346/2000, que son objet est la poursuite des contrats de travail des salariés, que l’exercice d’une telle action ne requiert pas l’intervention d’un syndic, au sens de l’article 2 du règlement n° 1346/2000, et ne tend pas au remboursement partiel des créanciers de sorte que l’action du salarié ne dérivait pas directement d’une procédure d’insolvabilité, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

    Syndicat professionnel – Protocole d’accord préélectoral.
    Cass., Soc., 8 décembre 2021, n° 20-16696.

    https://juricaf.org/arret/FRANCE-COURDECASSATION-20211208-2016696

    Le 19 décembre 2019, la société Serenest entreprise (la société) a invité les organisations syndicales à négocier un protocole d’accord préélectoral en vue des élections des membres du comité social et économique (CSE). Aucune organisation ne s’étant présentée à la négociation, l’employeur a organisé seul le scrutin qui s’est déroulé, pour le premier tour, le 31 janvier 2020, et, pour le second tour, le 12 février 2020. Un procès-verbal de carence a été établi à cette date.

    En application de l’article L. 2314-5, alinéas 1er et 2, du code du travail, doivent être invités par courrier à négocier le protocole d’accord préélectoral et à établir les listes de leurs candidats aux fonctions de membre de la délégation du personnel les organisations syndicales reconnues représentatives dans l’entreprise ou l’établissement, celles ayant constitué une section syndicale dans l’entreprise ou l’établissement, ainsi que les syndicats affiliés à une organisation syndicale représentative au niveau national et interprofessionnel.

    Il résulte de l’article L. 2142-1 du code du travail que la section syndicale doit comporter au moins deux adhérents.

    Pour annuler les élections professionnelles au CSE organisées au sein de la société les 31 janvier et 12 février 2020, le jugement retient que le syndicat établit avoir avisé l’employeur par lettre recommandée du 16 novembre 2018, reçue le 19 novembre suivant, de la création d’une section syndicale au sein de l’entreprise, qu’à la date des négociations du protocole d’accord préélectoral, l’employeur, qui avait connaissance de l’existence d’une section syndicale, n’avait pas contesté son existence ou son maintien, qu’à défaut d’avoir fait constater judiciairement la perte de l’existence de la section syndicale avant l’organisation des élections, il demeurait tenu d’inviter ce syndicat par courrier à la négociation, le cas échéant en contestant ensuite la validité de la représentation du syndicat si celui-ci mandatait un représentant aux négociations du protocole, que dès lors il ne pouvait prétendre qu’il appartenait au syndicat de rapporter la preuve d’au moins deux adhésions à la date de l’introduction des négociations alors que c’était à l’employeur, régulièrement avisé de la constitution de la section syndicale, d’agir en contestation de celle-ci et à défaut de tirer les conséquences de cette constitution par une invitation répondant aux prescriptions de l’alinéa 2 de l’article L. 2314-5 du code du travail.

    En statuant ainsi, alors, d’une part, qu’une contestation relative à l’existence d’une section syndicale peut être soulevée à l’occasion d’un litige relatif à l’invitation des organisations syndicales à la négociation du protocole d’accord préélectoral et, d’autre part, qu’il appartenait au syndicat de justifier que la section syndicale qu’il avait constituée comportait au moins deux adhérents à la date de l’invitation à la négociation du protocole d’accord préélectoral, le tribunal a violé les textes susvisés.

    Syndicat professionnel – Comité social et économique.
    Cass., Soc., 8 décembre 2021, n° 20-17688.

    https://juricaf.org/arret/FRANCE-COURDECASSATION-20211208-2017688

    Aux termes de l’article L. 2143-4 du code du travail, dans les entreprises d’au moins cinq cents salariés, tout syndicat représentatif dans l’entreprise peut désigner un délégué syndical supplémentaire s’il a obtenu un ou plusieurs élus dans le collège des ouvriers et employés lors de l’élection du comité social et économique et s’il compte au moins un élu dans l’un des deux autres collèges. Ce délégué supplémentaire est désigné parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité social et économique, quel que soit le nombre de votants.

    Lorsqu’une entreprise est divisée en établissements distincts pour l’élection des comités sociaux et économiques d’établissements, la désignation du délégué syndical supplémentaire prévue par l’article L. 2143-4 du code du travail étant subordonnée aux résultats des élections, la condition d’effectif prévue par ce texte s’apprécie par établissement.

    Dès lors que la désignation d’un délégué syndical supplémentaire est subordonnée, d’une part au caractère représentatif du syndicat, d’autre part à l’obtention d’élus dans au moins deux collèges, l’effectif d’au moins cinq cents salariés, au sens de ce texte, doit s’apprécier, dans l’établissement, à la date des dernières élections au comité social et économique, lesquelles, au regard du score électoral et du nombre d’élus obtenus par le syndicat, ouvrent le droit pour ce dernier de désigner un délégué syndical supplémentaire pour toute la durée du cycle électoral.

    Licenciement – Nullité.
    Cass., Soc., 1er décembre 2021, n°19-24766.

    https://juricaf.org/arret/FRANCE-COURDECASSATION-20211201-1924766

    Par arrêt du 25 juin 2020 (CJUE, arrêt du 25 juin 2020, Varhoven kasatsionen sad na Republika Bulgaria, C- 762/18 et Iccrea Banca, C-37-19), la Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit que l’article 7, § 1, de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil, du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une jurisprudence nationale en vertu de laquelle un travailleur illégalement licencié, puis réintégré dans son emploi, conformément au droit national, à la suite de l’annulation de son licenciement par une décision judiciaire, n’a pas droit à des congés annuels payés pour la période comprise entre la date du licenciement et la date de sa réintégration dans son emploi, au motif que, pendant cette période, ce travailleur n’a pas accompli un travail effectif au service de l’employeur. Il en résulte que sauf lorsque le salarié a occupé un autre emploi durant la période d’éviction comprise entre la date du licenciement nul et celle de la réintégration dans son emploi, il peut prétendre à ses droits à congés payés au titre de cette période en application des dispositions des articles L. 3141-3 et L. 3141-9 du code du travail. Doit en conséquence être cassé l’arrêt qui, pour rejeter la demande du salarié tendant à obtenir que l’employeur soit condamné à lui payer une rémunération pour chaque mois écoulé entre son éviction de l’entreprise et sa réintégration assortie des congés payés afférents, retient que la période d’éviction n’ouvre pas droit à acquisition de jours de congés.

    Contrat de travail – Rupture.
    Cass., Soc., 1er décembre 2021, n° 19-25715.

    https://juricaf.org/arret/FRANCE-COURDECASSATION-20211201-1925715

    En application de l’article L. 2422-1 du code du travail, le salarié protégé dont le licenciement est nul en raison de l’annulation de l’autorisation administrative doit être, s’il le demande, réintégré dans son emploi ou un emploi équivalent. Il en résulte que l’employeur ne peut licencier un salarié à la suite d’un licenciement pour lequel l’autorisation a été annulée que s’il a satisfait à cette obligation ou s’il justifie d’une impossibilité de réintégration.

    Ayant constaté que, tenu par son obligation de sécurité dont participe l’obligation de prévention du harcèlement moral, l’employeur ne pouvait pas réintégrer la salariée dès lors que celle-ci était la supérieure hiérarchique des autres salariés de l’entreprise, lesquels soutenaient avoir été victimes du harcèlement moral de cette dernière et avaient à ce propos exercé leur droit de retrait, de sorte qu’était caractérisée l’impossibilité de réintégration, la cour d’appel a légalement justifié sa décision.

    En vertu de l’article L. 2422-4 du code du travail, lorsque l’annulation d’une décision d’autorisation est devenue définitive, le salarié investi d’un des mandats mentionnés à l’article L. 2422-1 a droit au paiement d’une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, s’il en a formulé la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision. L’indemnité correspond à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l’expiration du délai de deux mois s’il n’a pas demandé sa réintégration. Ce paiement s’accompagne du versement des cotisations afférentes à cette indemnité qui constitue un complément de salaire.

    L’indemnité due, en application de l’article L. 2422-4 du code du travail, au salarié protégé, licencié sur le fondement d’une décision d’autorisation de l’inspecteur du travail ensuite annulée, a, de par la loi, le caractère d’un complément de salaire. Il en résulte que cette indemnité ouvre droit au paiement des congés payés afférents.

    Droits des affaires et droit commercial

    Fonds de commerce – Impôts et taxes.
    Cass. Com., 15 décembre 2021, n°18-20216.

    https://www.courdecassation.fr/decision/61b99380ef20f6a61afc360f?judilibre_publication[]=b&page=1&previousdecisionpage=1&previousdecisionindex=8&nextdecisionpage=2&nextdecisionindex=0

    La société par actions simplifiées Agrofibre a, le 4 mai 2007, présenté à la formalité de l’enregistrement un procès-verbal d’assemblée générale extraordinaire approuvant un traité portant promesse d’apport d’éléments incorporels par la société de droit espagnol Agrofibra SL et décidant d’une augmentation de capital. Cet acte a été soumis au droit fixe prévu par l’article 810, I, du code général des impôts.

    L’administration fiscale, considérant que l’opération s’analysait en un apport de fonds de commerce assujetti, conformément aux dispositions de l’article 809, I, 3° du code général des impôts, aux droits d’enregistrement prévus à l’article 719 de ce code, a notifié une proposition de rectification à la société Agrofibre le 7 juin 2011.

    Après rejet de sa réclamation, la société Agrofibre a assigné l’administration fiscale aux fins d’annulation de cette décision et de décharge des impositions et pénalités mises à sa charge.

    Par décision du 13 janvier 2020, la société Agrofibre a été dissoute par son associé unique, la société Euralis holding. Cette dissolution a entraîné la transmission universelle de son patrimoine. Après avoir relevé que, dès le début de son activité en 2007, la société Agrofibre, ayant pour objet social toutes opérations industrielles et commerciales se rapportant à l’achat, la vente de paille, de chanvre, de fibre, de chènevotte et de tout produit résultant des procédés de transformation de ces produits, avait eu pour clients ceux de la société Agrofibra, qui avaient représenté, au titre de l’exercice clos en 2009, près de 47 % du chiffre d’affaires de la société bénéficiaire de l’apport, et que l’un des principaux fournisseurs de matières premières de la société Agrofibra était également devenu le fournisseur de la société Agrofibre, puis constaté qu’il résultait de la demande de renseignements effectuée par l’administration fiscale auprès des autorités espagnoles que la société Agrofibra, dont l’objet social était le traitement, la transformation et la commercialisation de toutes espèces d’articles agricoles, animaux et forestiers, avait vu son chiffre d’affaires diminuer en 2006 pour devenir nul en 2008, tandis que celui de la société Agrofibre avait progressé, la cour d’appel a retenu que la cessation progressive d’activité de la société Agrofibra, révélée par la courbe de son chiffre d’affaires, correspondant à l’évolution très rapide de celui de la société Agrofibre, était révélatrice d’un transfert effectif de la clientèle et des moyens matériels et humains de la société espagnole au profit de la société française.

    De ces constatations et appréciations, caractérisant la transmission de l’activité et de la clientèle propres à la société ayant réalisé l’apport, la cour d’appel, qui en a déduit que l’acte d’apport en nature ainsi que la cession indirecte de matériel de la société Agrofibra à la société Agrofibre par l’intermédiaire de la société Van Domele constituaient une opération d’apport de fonds de commerce, corroborée par le transfert des contrats de travail de deux salariés et la transmission du nom commercial par simple francisation, a légalement justifié sa décision.

    Sociétés commerciales – Mandataire.
    Cass., Soc., 15 décembre 2021, n°20-12307.

    https://www.courdecassation.fr/decision/61b99380ef20f6a61afc3610?judilibre_publication[]=b&page=2&previousdecisionpage=2&previousdecisionindex=4&nextdecisionpage=2&nextdecisionindex=6

    La société U10 Corp (la société U10), associée majoritaire de la société à responsabilité limitée U-Web ayant pour gérant et coassocié M. [W], a, le 19 février 2016, demandé à ce dernier la convocation d’une assemblée générale ayant pour ordre du jour la décision à prendre sur la révocation du gérant et la désignation d’un nouveau gérant. Devant le refus de M. [W], la société U10 a saisi en la forme des référés le président d’un tribunal de commerce afin d’obtenir la désignation d’un mandataire chargé de convoquer l’assemblée générale. M. [W] et la société U-Web se sont opposés à cette demande.

    Si c’est à tort que la cour d’appel a énoncé que le juge, saisi par un associé détenant au moins la moitié des parts sociales d’une société à responsabilité limitée d’une demande de désignation d’un mandataire chargé de convoquer une assemblée générale ayant pour ordre du jour la révocation du gérant, n’a pas à apprécier cette demande au regard de l’intérêt social, sa décision n’encourt pas pour autant la censure dès lors que les allégations de M. [W] et de la société U-Web, selon lesquelles la demande de la société U 10 n’était pas conforme à l’intérêt social, n’avaient, en réalité, pour objet que de contester les motifs de la révocation envisagée.

    Bail commercial – Obligations du bailleur.
    Cass., Civ., 3ème, 15 décembre 2021, n° 20-14423.

    https://www.courdecassation.fr/decision/61b99380ef20f6a61afc360c?judilibre_publication[]=b&page=2&previousdecisionpage=2&previousdecisionindex=6&nextdecisionpage=2&nextdecisionindex=8

    Par acte des 16 et 23 mars 2010, la société civile immobilière du Bassin Nord (la SCI) a consenti à la société ADC, aux droits de laquelle se trouve la société AMC, un bail commercial sur un local situé au premier étage du centre commercial du Millénaire à Aubervilliers.

    Le 3 juillet 2014, la société AMC a assigné la SCI en résiliation du bail et indemnisation de son préjudice résultant des manquements du bailleur à son obligation de délivrance et à ses engagements contractuels, en n’assurant pas une commercialité du centre permettant l’exploitation pérenne de son fonds.

    Selon l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
    Il résulte de l’article 1719 du même code que le bailleur est obligé, par la nature même du contrat de délivrer au preneur la chose louée et d’entretenir cette chose en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée, sans être tenu, en l’absence de clause particulière, d’en assurer la commercialité.

    Pour déduire l’existence à la charge du bailleur de l’obligation de délivrer à la société AMC un local dans un centre commercial de haut de gamme présentant une décoration soignée, l’arrêt retient qu’il résulte des articles 3 et 13 des conditions générales du bail, ainsi que de l’article 14 de ses conditions particulières, que les parties ont entendu tout mettre en œuvre pour que le centre ait un positionnement différent des autres centres, non seulement en termes de qualité environnementale, mais également quant à l’architecture et à la décoration particulièrement soignée.

    En statuant ainsi, après avoir relevé que les clauses précitées n’engendraient d’obligations qu’à la charge du preneur mais aucune obligation particulière à la charge du bailleur, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

    Cession de créance – Notification.
    Cass., Civ., 3ème, 8 décembre 2021, n° 20-16152.

    https://www.courdecassation.fr/decision/61b058f3dc637ddd76c35ecb?judilibre_publication[]=b&previousdecisionpage=0&previousdecisionindex=8&nextdecisionpage=1&nextdecisionindex=0

    Selon l’article L. 313-28 du code monétaire et financier, dans sa rédaction alors applicable, l’établissement de crédit ou la société de financement cessionnaire d’une créance par remise de bordereau, peut, à tout moment, interdire au débiteur de la créance cédée de payer entre les mains du signataire du bordereau. A compter de cette notification, le débiteur ne se libère valablement qu’auprès du cessionnaire.

    Aux termes de l’article R. 313-17 du même code, lorsque la créance est cédée ou nantie au titre d’un marché public, la notification doit être faite entre les mains du comptable assignataire désigné dans les documents contractuels.

    Il résulte de la combinaison de ces textes que le second, qui désigne l’autorité à laquelle la notification doit être faite lorsque la créance est cédée ou nantie au titre d’un marché public, n’est applicable qu’aux cessions de créance détenues sur des personnes morales de droit public.

    European Court of Justice

    Reference for a preliminary ruling – Directive 2003/88/EC – Organisation of working time – Protection of the health and safety of workers – Article 7(1) – Right to paid annual leave – Level of remuneration – Reduced remuneration due to incapacity for work.
    ECJ, 9 December 2021, XXXX v Staatssecretaris van Financiën, C-217/20.

    https://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?text=&docid=250864&pageIndex=0&doclang=en&mode=lst&dir=&occ=first&part=1&cid=646747

    Article 7(1) of Directive 2003/88/EC of the European Parliament and of the Council of 4 November 2003 concerning certain aspects of the organisation of working time must be interpreted as precluding national provisions and practices under which, where a worker who is incapacitated for work due to illness exercises his or her right to paid annual leave, the reduction, following the incapacity for work, of the amount of remuneration that he or she received during the period of work preceding that during which annual leave is requested, is taken into account to determine the amount of remuneration that will be paid to him or her in respect of his or her paid annual leave.

    Tags:


    Inscrivez-vous à notre infolettre

    Inscrivez-vous à notre infolettre

    Joignez-vous à notre liste de diffusion pour recevoir les dernières nouvelles de notre cabinet avocats.

    Merci!