NEWSLETTER – MAI 2016

NEWSLETTER – MAI 2016

Droit du travail et sécurité sociale

  • Clause de mobilité – Préavis. Cass. Soc., 31 mars 2016, N°14-19711

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032353042&fastReqId=892678361&fastPos=18

  1. X… a été engagé le 1er mars 2001 par la société Ascom devenue société Multitoll solutions en qualité de technicien support technique. Licencié le 3 mai 2012 pour refus de mise en œuvre de la « clause de mobilité » prévue par son contrat de travail, il a saisi la juridiction prud’homale.

Pour condamner l’employeur à payer une indemnité compensatrice de préavis, l’arrêt retient qu’il n’est pas contesté que le salarié travaillait à la veille du licenciement dans les locaux de la société ACS, nouvellement installée à Antibes, que l’employeur ne justifiait d’aucun obstacle au maintien de cet aménagement jusqu’à la fin de la relation contractuelle, qu’il s’ensuivait que le salarié était fondé à soutenir avoir été mis dans l’impossibilité d’exécuter son préavis dès lors que l’employeur avait exigé que celui-ci soit effectué à Asnières alors même qu’il se trouvait licencié précisément au motif qu’il avait refusé sa mutation en ce lieu.

Cependant, le refus d’un salarié de poursuivre l’exécution de son contrat de travail en raison d’un simple changement des conditions de travail décidé par l’employeur dans l’exercice de son pouvoir de direction rend ce salarié responsable de l’inexécution du préavis qu’il refuse d’exécuter aux nouvelles conditions et le prive des indemnités compensatrices de préavis et de congés payés afférents.

En statuant comme elle l’a fait, après avoir relevé que le contrat de travail du salarié contenait une clause de mobilité, ce dont il résultait, d’une part, que sa mutation constituait un simple changement de ses conditions de travail que l’employeur pouvait décider unilatéralement dans l’exercice de son pouvoir de direction, d’autre part, que l’employeur, qui avait licencié le salarié à raison de son refus de ladite mutation, pouvait lui imposer d’exécuter son préavis dans les conditions nouvellement prévues, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l’article L. 1234-5 du code du travail.

 

 

  • Inaptitude du salarié – Obligation de reclassement. Cass. Soc., 31 mars 2016, N°14-28314.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032353079&fastReqId=892678361&fastPos=25

Selon l’article L. 1226-2 du code du travail, lorsque, à l’issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur l’aptitude du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise.

L’emploi proposé est aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. Il ne résulte pas de ces dispositions que les propositions de reclassement doivent être faites par écrit.

 

 

  • Salarié protégé – Licenciement. Cass. Soc., 23 mars 2016, N°14-22950, 14-22960, 14-22961 et 14-22963.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032313268&fastReqId=892678361&fastPos=49

  1. X…, salarié protégé de la société Celeos Normandie et trois autres salariés protégés, salariés de la société BCP Normandie, ont été licenciés pour motif économique le 24 décembre 2008.

Si, en l’état d’une autorisation administrative de licencier un salarié protégé accordée à l’employeur par l’inspecteur du travail, le juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, se prononcer sur le caractère réel et sérieux de la cause de licenciement, il résulte de l’article L. 631-17 du code de commerce que lorsqu’un licenciement a été autorisé par une ordonnance du juge-commissaire, le caractère économique du licenciement et la régularité de l’ordonnance du juge commissaire ne peuvent être discutés devant l’administration.

C’est dès lors à bon droit que la cour d’appel a retenu que le juge judiciaire était compétent pour apprécier la régularité de l’ordonnance du juge-commissaire.

En application de l’article R. 631-26 du code de commerce, des licenciements économiques ne peuvent être valablement prononcés en vertu d’une autorisation de licencier donnée par la juridiction qui arrête un plan de cession qu’à la condition que cette décision précise, dans son dispositif, le nombre des salariés dont le licenciement est autorisé, ainsi que les activités et catégories professionnelles concernées.

La cour d’appel qui a constaté que l’ordonnance ne déterminait pas elle-même le nombre des salariés dont le licenciement était autorisé ainsi que les activités et catégories professionnelles concernées mais renvoyait à une annexe, laquelle n’était pas signée, a, par ces seuls motifs, décidé à bon droit que les licenciements pour motif économique étaient sans cause réelle et sérieuse.

 

  • Contrat à durée déterminée – Requalification. Cass. Soc., 23 mars 2016, N°14-22250.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032313373&fastReqId=892678361&fastPos=52

Mme X… a été engagée par La Poste dans le cadre d’une première série de contrats à durée déterminée sur la période du 1er juin 1992 au 31 mars 1993, terme des relations entre les parties. Elle a été à nouveau engagée par La Poste à compter du 11 mars 2000 en vertu d’un contrat à durée déterminée à temps partiel. Le 1er décembre 2002, les parties ont signé un contrat à durée indéterminée à temps partiel suivi d’un contrat à durée indéterminée à temps complet en date du 20 mars 2006 pour un emploi de facteur, niveau de classification I.2, puis le 20 juillet 2007 pour un emploi d’agent rouleur distribution. Sollicitant la requalification de ses contrats à compter de la date initiale du 1er juin 1992, la salariée a saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes en paiement. Le syndicat Sud poste Marne est intervenu volontairement à l’instance.

Pour débouter la salariée de sa demande de dommages-intérêts en réparation de son préjudice complémentaire lié à ses droits à la retraite, l’arrêt énonce qu’ayant été embauchée à compter du 1er décembre 2002 en contrat à durée indéterminée soit          2 ans après le contrat à durée déterminée conclu en 2000, la salariée ne justifie pas d’un préjudice moral ou financier ou d’une perte de chance, notamment au regard de ses droits à la retraite.

En statuant ainsi, alors que les effets de la requalification de contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée remontent à la date de la conclusion du premier contrat à durée déterminée irrégulier, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l’article L. 1245-1 du code du travail.

Pour débouter le syndicat Sud poste Marne de sa demande de dommages-intérêts, l’arrêt énonce qu’eu égard à l’issue du litige, il n’est pas démontré par la présente procédure l’existence d’une atteinte à l’intérêt collectif de la profession que le syndicat intervenant représente, dès lors que l’employeur en l’espèce n’a pas méconnu les dispositions de la convention collective applicable.

En statuant ainsi, alors que la violation des dispositions légales relatives au contrat à durée déterminée est de nature à porter atteinte à l’intérêt collectif de la profession, la cour d’appel a violé l’article L. 2132-3 du code du travail.

 

  • Travail temporaire – Possibilité d’embauche de travailleurs permanents. Cass. Soc., 23 mars 2016, N°14-23276.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032313339&fastReqId=892678361&fastPos=56

Mme X… a été engagée par la société Carglass en qualité d’assistante logistique. Ayant été licenciée en octobre 2010, elle a saisi la juridiction prud’homale. L’Union locale CGT est intervenue dans ce dossier.

La violation des dispositions relatives au travail temporaire, en diminuant la possibilité d’embauche de travailleurs permanents, est de nature à porter préjudice à l’intérêt collectif de la profession.

Pour condamner l’employeur à verser à l’Union locale CGT Chatou la somme de 500 euros au titre du préjudice subi, l’arrêt retient que la présence de clauses illicites dans le contrat de travail portent atteinte à l’intérêt collectif de la profession à laquelle appartient la salariée et justifie la demande du syndicat.

En statuant ainsi, la cour d’appel a violé l’article L. 2132-3 du code du travail.

 

  • Contrats à durée déterminée successifsRequalification. Cass. Soc., 16 mars 2016, N°15-11396.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032265898&fastReqId=892678361&fastPos=112

  1. X… a travaillé pour la société France Télévisions France 3, aux droits de laquelle vient la société France Télévisions, à compter du 1er juin 1983, en qualité de chef opérateur son-vidéo, dans le cadre de 769 contrats à durée déterminée successifs. La société France Télévisions a cessé de faire appel à M. X… à l’issue d’un contrat à durée déterminée expirant le 5 avril 2009. Il a saisi la juridiction prud’homale de demandes tendant à la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée et au paiement de sommes liées à cette requalification ainsi qu’à la rupture.

Le calcul des rappels de salaire consécutifs à la requalification de contrats à durée déterminée successifs en contrat à durée indéterminée, qui s’effectue selon les conditions contractuelles fixant les obligations de l’employeur telles qu’elles résultent de cette requalification, n’est pas affecté par les sommes qui ont pu être versées au salarié par l’organisme compétent au titre de l’assurance chômage.

 

  • Indemnité de licenciement – Clause pénale. Cass. Soc., 16 mars 2016, N°14-23861.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032266006&fastReqId=892678361&fastPos=116

  1. X…, engagé le 1er septembre 2009 par la société Atalian ingenierie des services en qualité de directeur général, a été licencié pour faute grave par lettre du 16 décembre 2009. Contestant son licenciement, il a saisi la juridiction prud’homale.

Pour condamner l’employeur, qui en demandait la réduction par application de l’article 1152 du code civil, au paiement d’une somme à titre d’indemnité «conventionnelle » de licenciement, l’arrêt retient que la reprise d’ancienneté qui a été accordée au salarié lors de son engagement n’a pas eu pour effet de transformer l’indemnité conventionnelle en une indemnité de nature contractuelle et qu’il n’y a, dès lors, aucun obstacle juridique à ce que le salarié fasse valoir un accord d’entreprise de nature collectif expressément visé dans son contrat de travail, dans la mesure où il s’avère plus favorable pour lui, conformément au droit positif applicable.

Cependant, l’indemnité de licenciement, lorsqu’elle est prévue par le contrat de travail, a le caractère d’une clause pénale et peut être réduite par le juge si elle présente un caractère manifestement excessif.

En statuant comme elle l’a fait, alors qu’elle constatait que le contrat de travail se référait, non pas à l’application globale de l’accord d’entreprise Eurogem du 1er septembre 2003, mais seulement à la base de calcul de l’indemnité conventionnelle prévue par cet accord, de sorte qu’il lui appartenait de vérifier si l’indemnité contractuelle de licenciement ainsi stipulée présentait un caractère manifestement excessif, la cour d’appel a violé les articles 1134 et 1152 du code civil.

 

  • Licenciement – Action en justice. Cass. Soc., 16 mars 2016, N°14-23589.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032265989&fastReqId=892678361&fastPos=119

Est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale le licenciement intervenu en raison d’une action en justice introduite par le salarié.

  1. X… a été engagé, selon contrat à durée déterminée du 1er juillet 2009, par la société Areva T & D production en qualité de technicien sur ligne de production puis d’approvisionneur gestionnaire. Avant le terme de ce contrat il a été engagé le 29 décembre 2010 par la société Panda services en qualité de gestionnaire approvisionneur de production et mis à la disposition de la société Areva T & D production, dont l’activité a été reprise par la société Schneider electric protection et contrôle. Il a conclu le 29 juin 2011 avec cette société un contrat à durée déterminée portant sur le même poste et ayant pour terme le 31 décembre 2012. Le salarié a saisi au fond la juridiction prud’homale aux fins notamment d’obtenir la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée.

Par ordonnance de référé du 20 décembre 2012, le conseil de prud’hommes de Montpellier a ordonné à l’employeur de maintenir le contrat de travail jusqu’à la décision à intervenir au fond. Le 22 mars 2013, l’employeur a remis au salarié une lettre l’informant de ce qu’il accédait à sa demande de requalification de la relation de travail et le convoquant à un entretien préalable à un éventuel licenciement. Il a licencié le salarié pour insuffisance professionnelle le 19 avril 2013.

Pour débouter le salarié de ses demandes principales tendant à la nullité du licenciement, à sa réintégration et au paiement de sommes à titre de salaire et de dommages-intérêts pour absence d’exécution de bonne foi du contrat de travail, l’arrêt retient, d’abord que si l’ordonnance de référé du 20 décembre 2012 avait prévu, à titre de mesure conservatoire, que la société devait sous astreinte, maintenir le contrat de travail de M. X… jusqu’à décision au fond à intervenir du bureau de jugement concernant la demande en requalification des relations contractuelles en contrat à durée indéterminée, les conditions de cette ordonnance ont été respectées durant l’instance de sorte que les dispositions de celle-ci ont épuisé leurs effets et que les droits fondamentaux de ce salarié ont été respectés, ensuite que la réintégration après le licenciement d’un salarié ne bénéficiant pas d’une protection légale ne peut être ordonnée en l’état de la législation et que les droits fondamentaux du salarié n’ont pas été compromis par la volonté unilatérale de l’employeur de mettre fin au contrat à durée indéterminée dans les conditions de forme prévues par la loi avec l’énonciation d’un motif précis par une lettre alors en effet que tout contrat à durée indéterminée peut être rompu à l’initiative de l’un ou l’autre des cocontractants sauf à répondre d’un abus par la sanction de dommages intérêts.

En statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses énonciations que l’employeur n’avait pas, en licenciant le salarié le 19 avril 2013, respecté les dispositions de l’ordonnance de référé qui prescrivaient la poursuite du contrat de travail jusqu’à intervention de la décision au fond du conseil de prud’hommes, prononcée le 23 juillet 2013, la cour d’appel, qui s’est abstenue de rechercher si l’employeur avait utilisé son pouvoir de licencier en rétorsion à l’action en justice du salarié, a violé les articles L. 1221-1 du code du travail et 6, § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

 

 

  • Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail – Frais d’expertise. Cass. Soc., 15 mars 2016, N°14-16242.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032266053&fastReqId=892678361&fastPos=121

Aux termes de l’article 62 de la Constitution, les décisions du Conseil constitutionnel s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles.

Par décision 2015-500 QPC du 27 novembre 2015, le Conseil constitutionnel rappelle qu’il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de cassation que, lorsque le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail décide de faire appel à un expert agréé en application de l’article L. 4614-12 du code du travail, les frais de l’expertise demeurent à la charge de l’employeur, même lorsque ce dernier obtient l’annulation en justice de la délibération ayant décidé de recourir à l’expertise après que l’expert désigné a accompli sa mission.

S’il énonce que la combinaison de l’absence d’effet suspensif du recours de l’employeur et de l’absence de délai d’examen de ce recours conduit, dans ces conditions, à ce que l’employeur soit privé de toute protection de son droit de propriété en dépit de l’exercice d’une voie de recours, et qu’il en découle que la procédure applicable méconnaît les exigences découlant de l’article 16 de la Déclaration de 1789 et prive de garanties légales la protection constitutionnelle du droit de propriété, en sorte que le premier alinéa et la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 4614-13 du code du travail doivent être déclarés contraires à la Constitution, le Conseil constitutionnel décide que l’abrogation immédiate du premier alinéa et de la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 4614-13 du code du travail aurait pour effet de faire disparaître toute voie de droit permettant de contester une décision de recourir à un expert ainsi que toute règle relative à la prise en charge des frais d’expertise et que, par suite, afin de permettre au législateur de remédier à l’inconstitutionnalité constatée, il y a lieu de reporter au 1er janvier 2017 la date de cette abrogation.

Il résulte de la décision du Conseil constitutionnel que les dispositions de l’article L. 4614-13 du code du travail telles qu’interprétées de façon constante par la Cour de cassation demeurent applicables jusqu’à cette date.

Par délibération du 18 décembre 2008, le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de l’établissement de Joué-les-Tours de la société Michelin a décidé d’avoir recours à la mesure d’expertise prévue par l’article L. 4614-12 du code du travail, qu’il a confiée à la société Intervention sociale et alternatives en santé au travail (ISAST). Le président du tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés, a débouté, le 17 février 2009, l’employeur de sa contestation de la nécessité du recours à expertise. Le 1er juillet 2009, la cour d’appel a annulé la délibération du CHSCT et condamné l’employeur au paiement des frais irrépétibles et des dépens, en l’absence d’abus du CHSCT. La société ISAST a saisi le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés d’une demande de recouvrement de ses honoraires formée à l’encontre de l’employeur.

Pour rejeter cette demande, l’arrêt retient qu’il appartenait à l’expert d’attendre l’issue de la procédure de contestation de la délibération du CHSCT, en date du 20 novembre 2008, avant d’effectuer son expertise car il n’était tenu à aucun délai, ce qui est corroboré par le fait qu’il n’a pas réalisé son expertise, ni dans le délai d’un mois ni dans celui de 45 jours, que son attention avait été attirée à plusieurs reprises par l’employeur sur le fait qu’en cas d’annulation de cette délibération, il ne serait pas réglé de ses prestations, que dès lors rien ne justifie la condamnation de l’employeur sur le fondement de l’article L. 4614-13 du code du travail à s’acquitter des frais de l’expertise.

En statuant ainsi, la cour d’appel a méconnu la portée de l’article 62 de la Constitution et l’article L. 4614-13 du code du travail.

 

  • Mise en inactivité anticipée – Différences de traitement fondées sur l’âge. Cass. Soc., 9 mars 2016, N°14-25840.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032195038&fastReqId=892678361&fastPos=140

Selon l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, nonobstant l’article 2, paragraphe 2, les Etats membres peuvent prévoir que des différences de traitement fondées sur l’âge ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs légitimes de politique de l’emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires.

  1. X… a été engagé le 18 juin 1979 en qualité d’ouvrier électricien avec un statut d’agent EDF par l’entreprise EDF-GDF. Par lettre du 17 janvier 2006, il lui a été notifié sa mise en inactivité d’office pour le 1er novembre 2006, soit le lendemain de la date anniversaire de ses 55 ans. M. X… a saisi la juridiction prud’homale aux fins notamment d’obtenir des dommages-intérêts au titre de la nullité de la rupture.
    Pour débouter le salarié de sa demande de condamnation de l’employeur à lui verser des sommes au titre de la nullité de la rupture et à titre de dommages-intérêts pour discrimination, l’arrêt retient que pour réaliser l’objectif de préservation de la santé et de la sécurité des travailleurs occupant les fonctions physiquement les plus pénibles, le départ à la retraite anticipé du salarié était un moyen approprié et nécessaire dès lors qu’il avait été exposé pendant 23 ans à des conditions de travail pénibles caractérisées par une nuisance « bruit » de 100 % et des astreintes, et que, compte tenu des revalorisations de taux rétroactives intervenues avant la saisine de la juridiction prud’homale, ce salarié avait perçu dès 55 ans un taux de 74 %, lequel devait être comparé au taux maximal de 75 %.

En se déterminant ainsi, alors qu’elle avait constaté que le salarié occupait depuis cinq ans un poste administratif et que son médecin traitant l’avait déclaré en mesure de poursuivre une activité professionnelle et sans rechercher si la mise en inactivité anticipée était un moyen approprié et nécessaire, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard  des articles L. 1132-1 et L. 1133-1 du code du travail et l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi.

  • Réserve de participation – Action du syndicat. Cass. Soc., 9 mars 2016, N°14-11837 et 14-11862.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032195035&fastReqId=892678361&fastPos=141

La société Visual Ile-de-France, dénommée Pôle Ile-de-France immobilier and Facilities (société PIIF), a donné en location-gérance son fonds de commerce de transport en commun de voyageurs, suivant contrat du 17 mars 2006 avec effet au 1er mars 2006, à la société Visual Sud, dénommée Visual (société Visual), les deux sociétés appartenant au même groupe, devenu Véolia-Transdev. Un certain nombre de contrats de travail ont été transférés. La première société a présenté à la clôture des comptes de l’exercice 2006 un résultat bénéficiaire en raison de la vente d’un bien immobilier selon acte authentique signé le 21 décembre 2006 après signature, le 3 mai 2005, avec un tiers d’une promesse de vente portant sur ce bien immobilier, qui constituait son siège social situé à Massy. Par actes des 14 avril et 27 mai 2010, le syndicat général des transports centre francilien CFDT (le syndicat), alléguant une fraude des sociétés aux droits des salariés à la participation aux résultats de la société PIIF, a fait assigner les deux sociétés devant le tribunal de grande instance en constitution d’une réserve de participation au profit des salariés sur les bénéfices réalisés au cours de l’année 2006.

Pour déclarer recevable l’action du syndicat, l’arrêt retient que l’article L. 2132-3 du code du travail prévoit que les syndicats professionnels ont le droit d’agir en justice et peuvent exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif de la profession qu’ils représentent, que le syndicat vise à la constitution d’une réserve de participation pour l’exercice 2006 et à la répartition de son montant entre l’ensemble des salariés, que, par ailleurs, l’absence de réserve de participation, instituée collectivement par l’article L. 3322-1 du code du travail au profit des salariés, cause nécessairement un préjudice direct à l’intérêt collectif de la profession que ce syndicat représente.

En statuant ainsi, alors que l’action exercée par le syndicat tendant à la constitution d’une réserve spéciale de participation en raison d’une fraude alléguée aux droits des salariés à la participation aux résultats de l’entreprise, qui résulterait d’une mise en location-gérance, suppose au préalable que le juge se prononce sur la validité du transfert des contrats de travail intervenu en application de l’article L. 1224-1 du code du travail et que l’action en contestation du transfert d’un contrat de travail est un droit exclusivement attaché à la personne du salarié, de sorte que l’action du syndicat est irrecevable, la cour d’appel a violé l’article L. 2132-3 du code du travail, ensemble l’article L. 1224-1 du même code.

  • Travail intermittent – Requalification. Cass. Soc., 2 mars 2016, N°14-23009 et 14-23216.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032157877&fastReqId=892678361&fastPos=164

Le 1er septembre 2001, M. X… a été engagé par l’association Rueil athlétic club (RAC BAD) en qualité d’entraîneur de badmington pour une durée de onze mois avec un horaire de 45 heures par mois. Le 1er avril 2003, un contrat à durée indéterminée a été conclu. Le 18 octobre 2007 les parties ont signé un contrat de travail intermittent, pour une durée minimale annuelle de 630 heures. Le 31 août 2010, le salarié a pris acte de la rupture du contrat de travail, avant de saisir la juridiction prud’homale de diverses demandes.

Selon l’article L. 3123-31 du code du travail, le travail intermittent se distingue du travail à temps partiel en ce qu’il est destiné à pourvoir des emplois permanents comportant une alternance entre périodes travaillées et périodes non travaillées. Selon l’article 4. 5. 1 de la convention collective nationale du sport du 7 juillet 2005, interprétés à la lumière des clauses 4 et 5 de la directive n° 97/ 81/ CE du Conseil du 15 décembre 1997 concernant l’accord-cadre sur le travail à temps partiel, les États membres et les partenaires sociaux ont l’obligation d’identifier, d’examiner et le cas échéant d’éliminer, les obstacles de nature juridique ou administrative qui peuvent limiter les possibilités de travail à temps partiel, dont le travail intermittent, sous la qualification de travail à temps partiel cyclique vertical, est, au sens de cette directive, l’une des composantes .

Pour requalifier le contrat de travail intermittent en « contrat de travail » et condamner l’employeur au paiement d’un rappel de salaire, l’arrêt retient que la durée maximale de travail prévue par la convention collective nationale du sport pour un contrat de travail intermittent a été dépassée, que le calcul soumis par le salarié étant fondé sur un travail à temps plein dont le bénéfice lui a été refusé, il ne peut être retenu et que du fait du contrat de travail intermittent le salarié a été privé du paiement de seize semaines par an.

En statuant ainsi, alors, d’une part que la durée maximale annuelle prévue par l’article 4. 5. 1 de la convention collective nationale du sport ne porte pas sur la définition des emplois permanents qui, par nature, comportent une alternance de périodes travaillées et de périodes non travaillées, d’autre part que si le dépassement de cette durée ouvre droit au paiement d’heures correspondant à ce dépassement et, le cas échéant, quand le salarié a effectué des heures de travail au-delà de la limite prévue à l’article L. 3123-34 du code du travail, à des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi, il n’affecte pas, à lui seul, la qualification de contrat de travail intermittent, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

Aux termes de l’article 9. 2. 3. 1 1° de la convention collective nationale du sport du 7 juillet 2005, étendue le 21 novembre 2006, une prime égale à 1 % du SMC du groupe 3 est accordé aux salariés justifiant de 24 mois de travail effectif après la date d’extension de la présente convention ou le cas échéant 24 mois de travail effectif après l’embauche lorsque le salarié a été embauché après la date d’extension de la présente convention. Il en résulte que l’arrêté d’extension fait courir le délai de vingt-quatre mois au terme duquel la prime d’ancienneté est due.

Pour condamner l’employeur au paiement d’une somme à titre de prime d’ancienneté l’arrêt retient que le salarié, embauché en 2001, qui bénéficiait d’une ancienneté de plus de 24 mois à la date d’extension de la convention collective, était en droit d’obtenir dès le mois de novembre 2006 une prime d’ancienneté.

Après avoir constaté la nullité du licenciement, l’arrêt condamne l’employeur au remboursement des indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de trois mois.

En statuant ainsi, alors que le remboursement des indemnités de chômage ne peut être ordonné en cas de nullité du licenciement, la cour d’appel a violé l’article L. 1235-4 du code du travail.

 

  • Statut collectif – Primes de vacances. Cass. Soc., 2 mars 2016, N°14-16414 à 14-16420.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032158003&fastReqId=892678361&fastPos=166

La structure de la rémunération résultant d’un accord collectif dénoncé constitue à l’expiration des délais prévus à l’article L. 2261-13 du code du travail un avantage individuel acquis qui est incorporé au contrat de travail des salariés employés par l’entreprise à la date de la dénonciation, l’employeur ne pouvant la modifier sans l’accord de chacun de ces salariés, quand bien même estimerait-il les nouvelles modalités de rémunération plus favorables aux intéressés. Un engagement unilatéral de l’employeur contraire à ce principe ne peut avoir force obligatoire.

 

  1. X… et six autres salariés ont été engagés par la caisse d’épargne et de prévoyance de Rhône-Alpes (la caisse). La caisse nationale des caisses d’épargne et de prévoyance a dénoncé, le 20 juillet 2001, divers accords collectifs nationaux et locaux applicables au sein des entreprises du réseau des caisses d’épargne, dont l’un, du 19 décembre 1985, prévoyait le versement, outre d’un salaire de base, notamment de primes de vacances, familiale et d’expérience. Aucun accord de substitution n’a été conclu à l’expiration des délais prévus à l’article L. 2261-13 du code du travail. Au mois d’octobre 2002, à l’issue de la période de survie des accords qui avaient été dénoncés, la caisse a informé ses salariés que ces primes, devenues des avantages individuels acquis, ne figureraient plus de manière distincte sur les bulletins de salaire comme auparavant mais seraient intégrées au salaire de base.

Par deux arrêts (Soc, 1er juillet 2008, n° 07-40799 et 06-44437, Bull V n° 147), la chambre sociale de la Cour de cassation a jugé que la structure de la rémunération résultant d’un accord collectif dénoncé constitue à l’expiration des délais prévus par le troisième alinéa de l’article L. 2261-13 du code du travail un avantage individuel acquis qui est incorporé au contrat de travail des salariés employés par l’entreprise à la date de la dénonciation.

En conséquence de ces décisions, la caisse a, à compter de 2010, établi des bulletins de paie mentionnant sur des lignes distinctes le salaire de base et les avantages individuels acquis pour des montants cristallisés à la date de leur incorporation aux contrats de travail. Les  salariés ont saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes.

Pour condamner la caisse à établir, pour chacun des salariés, et pour la période allant d’octobre 2008 à novembre 2013, des bulletins de paie faisant apparaître distinctement le salaire de base et chacune des primes maintenues au titre des avantages individuels acquis valorisées en fonction de l’évolution du salaire de base, l’arrêt retient que l’employeur a pris en octobre 2002 un engagement unilatéral qu’il n’a pas dénoncé régulièrement depuis et qui portait sur l’intégration des avantages individuels acquis dans l’assiette de calcul des augmentations de salaire, et que les primes intégrées ont donc suivi l’évolution du salaire de base.

En statuant ainsi, alors que l’intégration des primes constitutives des avantages individuels acquis dans l’assiette de calcul des augmentations du salaire de base n’était que la conséquence de la décision illicite prise par la caisse en octobre 2002 de modifier unilatéralement la structure de la rémunération en intégrant lesdits avantages individuels acquis au salaire de base, ce dont elle aurait dû déduire qu’elle ne pouvait constituer un engagement unilatéral de l’employeur ayant force obligatoire, la cour d’appel a violé les articles L. 2261-13 du code du travail et 1134 du code civil.

 

  • Statut collectif – Pause rémunérée. Cass. Soc., 2 mars 2016, N°14-25896.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032157874&fastReqId=892678361&fastPos=167
Selon l’article 5.9 de l’accord collectif du 13 mai 2002, afin de prendre en considération les conditions particulières de travail du personnel affecté au traitement des valeurs, il est accordé à ces salariés une pause rémunérée de           10 minutes au cours d’un cycle de 3 heures de travail effectif, qui sera prise à des conditions déterminées par le chef de service. S’il en résulte que les salariés concernés doivent bénéficier d’un temps de pause rémunéré à l’intérieur d’un cycle de 3 heures de travail effectif, il ne s’en déduit pas que ce temps de pause rémunéré doive augmenter le temps de présence ou se traduire par l’octroi d’un supplément de rémunération.

Un accord collectif dit « contrat de progrès » a été conclu le 13 mai 2002 au sein de la société Brink’s évolution. Contestant l’application faite par l’employeur de l’article 5.9 de cet accord, des organisations syndicales ont saisi le tribunal de grande instance.

Pour faire droit à la demande des syndicats, l’arrêt, après avoir rappelé que le contrat de progrès accorde une pause rémunérée de dix minutes au cours d’un cycle de trois heures de travail effectif, retient par motifs adoptés que l’application qui est faite par la société Brink’s évolution des dispositions de l’accord de progrès relatives au temps de pause est défavorable aux salariés car elle conduit à les priver d’une partie de la rémunération qui leur est due pour les temps de pause et qui doit venir s’ajouter au salaire mensuel, qu’elle sera donc condamnée à verser mensuellement aux salariés de l’entreprise la prime de pause et à l’identifier dans les bulletins de paie afin d’éviter toute confusion possible avec le temps de travail effectif.

En statuant ainsi, la cour d’appel a violé l’article 5.9 de l’accord collectif du 13 mai 2002, ensemble l’article L. 3121-2 du code du travail.

Droit des affaires, concurrence, distribution et consommation

  • Qualité de commerçant – Travail dissimulé. Cass., Crim, 30 mars 2016, N°15-81478.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032350156&fastReqId=1292070300&fastPos=38

Selon l’article L. 8221-3 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d’activité, l’accomplissement d’actes de commerce par toute personne qui se soustrait intentionnellement à l’obligation de demander son immatriculation au registre du commerce et des sociétés lorsque celle-ci est obligatoire.

Au cours de perquisitions effectuées aux domiciles de MM. Y… et X…, ont été découverts de très nombreux objets dont ceux-ci ont revendiqué la propriété et dont la provenance a été établie par la présentation de factures d’achats. M. Y… a affirmé qu’il assurait sa subsistance en procédant, sur des marchés à Paris, à des acquisitions d’objets, tels que des téléphones portables, qu’il revendait à Mâcon auprès de particuliers ou auprès de commerçants spécialisés dans l’achat de matériel d’occasion. M. X… a admis avoir fait de nombreux achats, auprès de divers fournisseurs, d’objets comme des vêtements, des téléphones portables ou des pièces informatiques qu’il revendait essentiellement après exportation en Algérie, son pays d’origine, après avoir payé une taxe à l’entrée de ces objets.

  1. Y… et X…, poursuivis du chef de travail dissimulé par dissimulation d’activité pour avoir omis de requérir leur immatriculation au registre du commerce et des sociétés, ont été relaxés. Le procureur de la République a relevé appel de cette décision ;

Pour confirmer le jugement déféré, les juges du second degré, par motifs propres et adoptés, énoncent que M. Y… n’exerçait qu’une activité très limitée, dont le caractère professionnel n’était pas démontré, et ne nécessitant pas une immatriculation au registre du commerce. Les juges relèvent que, si M. X… a réalisé de très nombreux achats d’objets divers et a constitué un stock, il lui était loisible de ne pas revendre ces objets et qu’au demeurant, les opérations de revente n’étaient pas, selon ses dires, réalisées sur le territoire français. Ils ajoutent que si M. X… a revendu des véhicules sur internet, le nombre de ces véhicules est resté limité.

En statuant ainsi, alors qu’acquiert la qualité de commerçant assujetti à l’immatriculation au registre du commerce et des sociétés, quiconque, agissant en son nom et pour son propre compte, se livre de manière habituelle et professionnelle à des achats de biens meubles en vue de les revendre, que ces reventes aient lieu en France ou à l’étranger, la cour d’appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus énoncé.

 

  • Liquidation judiciaire – Demande de clôture. Cass., Com 22 mars 2016, N°14-21919.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032313146&fastReqId=1292070300&fastPos=65

  1. X… a été mis en liquidation judiciaire le 5 juillet 2006. A l’audience à laquelle l’affaire avait été renvoyée pour examiner la clôture de la procédure, le liquidateur a demandé le report de son examen. Le débiteur s’y est opposé en demandant la clôture. Le tribunal a rejeté la demande de clôture et ordonné la prorogation du délai de son examen. M. X… s’est pourvu en cassation contre l’arrêt ayant déclaré irrecevable l’appel qu’il a formé contre ce jugement.

La décision par laquelle le tribunal proroge le délai d’examen de la clôture de la procédure de liquidation judiciaire en application de l’article L. 643-9, alinéa 1er du code de commerce et rejette, par voie de conséquence, la demande de clôture faite par le débiteur pour s’opposer à ce report, est une mesure d’administration judiciaire non susceptible de recours, fût-ce pour excès de pouvoir.

 

  • Liquidation judiciaire – Procédure de rétablissement personnel. Cass., Com 22 mars 2016, N°14-18873.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032313127&fastReqId=1292070300&fastPos=70

Le 28 février 1989, la société Crédit industriel et commercial (la banque) a consenti à M. X…, pour l’acquisition d’un immeuble, un prêt garanti par le privilège de prêteur de deniers, qu’elle a inscrit. Le prêt n’ayant pas été remboursé, l’immeuble a fait l’objet, sur la requête de la banque, d’une adjudication le 12 novembre 1998. M. X… a été mis en liquidation judiciaire par un jugement du 25 janvier 1999 qui a désigné M. Y… en qualité de liquidateur. La liquidation judiciaire a été clôturée pour insuffisance d’actif le 6 septembre 1999. Le 25 septembre 2003, la banque a perçu le prix d’adjudication. Par un jugement du 4 mai 2007, le tribunal a ordonné la reprise de la procédure de la liquidation judiciaire. M. Y…, de nouveau désigné comme liquidateur, a, par lettre du 5 juin 2007, averti la banque d’avoir à déclarer sa créance de remboursement du prêt. Faisant valoir que la banque, ne lui ayant adressé sa déclaration que le 22 mars 2011, était forclose, il a demandé que le versement effectué le 25 septembre 2003 lui soit déclaré inopposable et que la somme correspondante lui soit restituée. La banque a saisi le juge-commissaire d’une demande tendant à ce que la forclusion lui soit, en l’absence d’avertissement régulier à déclarer sa créance privilégiée, jugée inopposable.

La reprise d’une liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d’actif, qui n’entraîne pas l’ouverture d’une nouvelle procédure, n’interdit pas au liquidateur d’adresser à un créancier titulaire d’une sûreté publiée l’avertissement d’avoir à déclarer sa créance prévu par l’article 66 du décret du 27 décembre 1985, lorsque cet avertissement n’a pas été envoyé avant la clôture.

Pour rejeter la demande, l’arrêt retient que, si l’avertissement du 5 juin 2007 indique que la liquidation judiciaire a été ouverte le 4 mai 2007, et non « rouverte » à cette date, l’avertissement, en dehors de cette imprécision, mentionne le bien immeuble de Marolles-en-Brie, objet de la sûreté, avec son adresse et les références de la banque, et reproduit les textes exigés à l’article 66 du décret du 27 décembre 1985, de sorte que sa régularité formelle n’est pas discutable et que l’identification de sa créance par la banque ne fait pas difficulté.

En statuant ainsi, alors qu’est irrégulier l’avertissement qui fait état de l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire quand il s’agit de la reprise des opérations de liquidation, la cour d’appel a violé les articles L. 621-46 du code de commerce, en sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, et 66 du décret du 29 décembre1985, en sa rédaction issue du décret du 21 octobre 1994 les textes susvisés.

Pour statuer comme il fait, l’arrêt retient encore qu’une procédure de rétablissement personnel a été ouverte à l’égard de M. X… et qu’en l’absence de production par la banque de sa créance, celle-ci a été déclarée éteinte le 9 septembre 2009 par un juge de l’exécution, en application de l’article L. 332-7 du code de la consommation.

En statuant ainsi, alors qu’en l’absence d’identité de parties, l’extinction de la créance dans la procédure de rétablissement personnel n’a pas autorité de la chose jugée dans la procédure de liquidation judiciaire reprise à l’égard du même débiteur, la cour d’appel a violé l’article 1351 du code civil.

 

  • Crédit-bail – Caution. Cass., Com 22 mars 2016, N°14-20216.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032313152&fastReqId=1292070300&fastPos=78

Les 26 octobre 2000, 6 juin et 20 novembre 2001, la société New Event Production a conclu avec la société BNP Paribas Lease Group quatre contrats de crédit-bail, dont MM. X… et Y… se sont rendus caution solidaire. Le débiteur principal ayant fait l’objet d’une procédure collective, le crédit-bailleur a assigné les cautions en paiement, lesquelles ont, à titre reconventionnel, recherché sa responsabilité pour manquement à son devoir de mise en garde.

Pour rejeter les demandes de M. X… et le condamner solidairement avec M. Y… à payer à la société BNP Paribas Lease Group les sommes restant dues en vertu des contrats de crédit-bail, l’arrêt, après avoir relevé que M. X… était cogérant dès la création de la société New Event Production et associé, retient qu’en considération des fonctions qu’il exerçait au sein de la société débitrice principale, il ne peut raisonnablement soutenir qu’il ne disposait pas des informations nécessaires à l’appréciation de la portée de ses engagements, l’état des comptes de l’entreprise, de ses charges et de ses engagements financiers ne pouvant lui être inconnus, de sorte qu’il ne peut être considéré comme une caution profane.

L’arrêt retient encore que les cautionnements ont été réitérés à plusieurs reprises à l’occasion des nouveaux contrats de crédit-bail qu’il a signés en sa qualité de cogérant les 6 juin et 20 novembre 2001, de sorte qu’il était en parfaite mesure d’apprécier la portée de ses propres engagements.

En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir que la caution était avertie, ce qu’elle ne pouvait déduire de sa seule qualité de dirigeant et associé de la société débitrice principale, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de  l’article 1147 du code civil.

Pour statuer comme il fait, l’arrêt retient encore, par motifs adoptés, que M. X… ne démontre pas qu’il n’a pas été mis en garde.

En statuant ainsi, alors qu’il appartient au crédit-bailleur, lorsqu’il est tenu d’une obligation de mise en garde, de démontrer qu’il l’a exécutée, la cour d’appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l’article 1315 du code civil.

 

  • Bail commercial – Révision du loyer. Cass., Civ., 3ème, 17 mars 2016, N°14-26009.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032265842&fastReqId=1292070300&fastPos=86

La société Generali Vie est propriétaire de locaux commerciaux donnés à bail le 22 janvier 2004 à la Société internationale d’investissements sportifs. Par avenants successifs des 5 septembre 2004, 22 avril 2005, 15 mars 2006, 14 août 2006, 1er août 2011 et à effet du 15 janvier 2013, les parties sont convenues de modifier l’assiette des lieux loués en y ajoutant d’autres locaux. Le 14 mai 2013, la locataire a demandé la révision du loyer en application de l’article L. 145-39 du code de commerce et sa fixation à une certaine somme.

Ayant  relevé que les parties étaient convenues, à chaque signature des avenants successifs, d’une extension de l’assiette du bail et d’un nouveau loyer, en considération notamment de cette extension, et que les modifications apportées par les avenants impliquaient autant de modifications conventionnelles du loyer, de sorte que la dernière modification par avenant ayant précédé la demande de révision légale devait être considérée comme le prix précédemment fixé conventionnellement au sens de l’article L. 145-39 du code de commerce, la cour d’appel, qui a constaté que la variation entre le loyer en vigueur à la date de la demande de révision et le loyer précédemment fixé conventionnellement n’atteignait pas 25 %, en a exactement déduit que la demande de la société locataire était irrecevable.

 

  • Bail commercial – Sous-location. Cass., Civ., 3ème, 17 mars 2016, N°14-24748.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032265843&fastReqId=993597738&fastPos=1

La société CSIF, locataire, en vertu d’un bail commercial à effet du 27 mai 2003, de locaux appartenant à la SCI Massy, les a donnés en sous-location à la société Ricoh selon un bail du 18 mai 2005 devant s’achever le 26 mai 2009. La société Ricoh a, par lettre recommandée du 26 janvier 2009, donné un congé à effet du 26 mai 2009, puis, après contestation de la validité de ce congé, elle a, par acte extra-judiciaire du 26 juin 2009, délivré un congé à effet du 31 décembre 2009. La société CSIF a assigné la société Ricoh en nullité du congé délivré le 26 janvier 2009 et en paiement de loyers et charges jusqu’au 18 mars 2011, date d’échéance de la période triennale du bail de sous-location à laquelle le congé du 26 juin 2009 produira ses effets.

Un  sous-bail commercial peut être conclu pour une durée inférieure à celle, restant à courir, du bail principal. Ayant retenu que la durée prévue du sous-bail ne constituait pas une renonciation de l’une ou l’autre des parties aux dispositions du statut des baux commerciaux qui imposaient la délivrance d’un congé par acte extra-judiciaire, la cour d’appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision.

 

  • Bail commercial – Cession judiciaire. Cass., Com., 1er mars 2016, N°14-14716.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032157873&fastReqId=1292070300&fastPos=172

Sauf disposition contraire du jugement arrêtant le plan de cession, la cession judiciaire forcée du bail commercial en exécution de ce plan n’est pas soumise aux exigences de forme prévues par ce contrat.

Un jugement du 24 mars 2009 a arrêté au profit de la société CCV Beaumanoir, à laquelle s’est substituée la société Cafan, la cession des actifs de la société Nos Enfants aussi, incluant le bail commercial consenti à cette dernière par la société Vêtements Henry Mazoyer. La cession a été régularisée par un acte sous seing privé du 5 juin 2009 et signifiée au bailleur le 6 juillet suivant. Faisant valoir que la cession avait été conclue sans respecter la forme authentique prévue par le contrat de bail en cas de cession, le bailleur a assigné le cessionnaire en résiliation et en expulsion.

Pour prononcer la résiliation du bail, l’arrêt, après avoir constaté que la cession du fonds avait eu lieu par acte sous seing privé, contrairement aux clauses claires et précises du bail prévoyant que toute cession devait être reçue par acte authentique, retient que le non-respect de ces exigences de forme constitue une infraction aux clauses du bail qui présente un caractère de gravité suffisante pour conduire à la résiliation de celui-ci.

En statuant ainsi, la cour d’appel a violé l’article L. 642-7 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, rendu applicable, par l’article L. 631-22 du même code, au plan de cession arrêté à la suite de l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire.

 

  • Redressement judiciaire Cautionnement. Cass., Com., 1er mars 2016, N°14-20553.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032157806&fastReqId=1292070300&fastPos=174

Selon l’article L. 622-28, alinéas 2 et 3, du code de commerce qui est applicable à la procédure de redressement judiciaire, le créancier bénéficiaire d’un cautionnement consenti par une personne physique, en garantie de la dette d’un débiteur principal mis ensuite en redressement judiciaire, peut prendre des mesures conservatoires sur les biens de la caution et doit, en application des deux autres, introduire dans le mois de leur exécution une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l’obtention d’un titre exécutoire, à peine de caducité de ces mesures. Il en résulte que l’obtention d’un tel titre ne peut être subordonnée à l’exigibilité de la créance contre la caution.

  1. X… et Z… se sont rendus caution solidaire envers la société Banque Chaix (la banque) d’un prêt qu’elle avait consenti à la société Le Refuge des pirates dans la limite de la somme de 325 000 euros. Après l’ouverture, le 8 décembre 2010, d’une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société débitrice principale, la banque a déclaré sa créance puis a été autorisée par un juge de l’exécution à inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur des biens appartenant aux cautions, qu’elle a ensuite assignées en paiement. La société débitrice a fait l’objet d’un plan de redressement le 7 décembre 2011.

Pour rejeter la demande en paiement, l’arrêt retient que la banque ne justifie pas de l’exigibilité de sa créance, laquelle n’était pas acquise à la date du jugement d’ouverture du redressement judiciaire de la société débitrice principale et n’a pu résulter de ce jugement ou de celui arrêtant le plan, la preuve n’étant pas rapportée, par ailleurs, que la société débitrice ne s’acquitterait pas des échéances du prêt.

En statuant ainsi, alors que la banque était fondée, afin d’éviter la caducité de sa mesure conservatoire, à obtenir un jugement de condamnation des cautions avant l’exigibilité de sa créance à leur égard, la cour d’appel a violé l’article L. 622-28, alinéas 2 et 3, du code de commerce et les articles R. 511-4 et R. 511-7 du code des procédures civiles d’exécution.

  • Prêt – Redressement judiciaire. Cass., Com., 1er mars 2016, N°14-14401.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032157852&fastReqId=1292070300&fastPos=175

La société Le Crédit lyonnais (la banque) a, par acte du 17 août 2009, consenti un prêt de 200 000 euros à la société Lefranc Vinolux (la société), qui, le 16 septembre 2011, a été mise en redressement judiciaire. Se prévalant d’un gage sur stocks avec dépossession que lui avait consenti la société par une lettre du 17 juin 2009, la banque a déclaré sa créance à titre privilégié. Par ordonnance du 25 octobre 2012, le juge-commissaire a admis la créance à titre chirographaire. La banque a relevé appel et la société a été mise en liquidation judiciaire.

Pour confirmer l’ordonnance du juge-commissaire, l’arrêt retient que, s’agissant d’un gage portant sur un stock de matières premières et d’approvisionnements, éléments visés à l’article L. 527-3 du code de commerce, la convention des parties dont l’une est un établissement de crédit ne peut être soumise au droit commun des articles 2333 et suivants du code civil et L. 521-1 et suivants du code de commerce mais nécessairement au régime spécial du gage des stocks prévu par les articles L. 527-1 et suivants de ce dernier code et que, ne comportant pas les mentions cumulativement exigées par la loi, la lettre de la société invoquée par la banque ne vaut pas constitution de gage des stocks.

En statuant ainsi, alors que les dispositions des articles L. 527-1 et suivants du code de commerce s’appliquent seulement au gage des stocks sans dépossession et ne font pas obstacle à ce que, pour un gage des stocks avec dépossession, les parties, dont l’une est un établissement de crédit, soumettent leur contrat au droit commun du gage de meubles, la cour d’appel a violé les articles 2337 du code civil et L. 527-1 du code de commerce, le premier par refus d’application et le second par fausse application.

 

  • Redressement judiciaire – Contrat d’administrateur judiciaire. Cass., Com., 1er mars 2016, N°14-19875.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032157834&fastReqId=1292070300&fastPos=176

La société Sarth’inox (la société) ayant été mise en redressement judiciaire le 9 mars 2010, l’administrateur judiciaire a, le 4 février 2011, adressé à M. X…, agent commercial, une lettre pour l’informer qu’en application des dispositions de l’article L. 622-13 du code de commerce, il n’entendait pas poursuivre le contrat qui le liait à la société. Le 22 février suivant, un plan de continuation a été arrêté par le tribunal. M. X… a assigné la société et le commissaire à l’exécution du plan en paiement d’une indemnité de résiliation pour rupture de son contrat. Un jugement du 9 juin 2015 a résolu le plan et prononcé la liquidation judiciaire de la société.

M. X… fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande alors, selon le moyen, que l’administrateur qui, fût-ce tacitement, a pris parti pour la continuation d’un contrat en cours doit, s’il entend ultérieurement y mettre un terme en raison d’un manquement du cocontractant du débiteur à l’une de ses obligations, en demander judiciairement la résiliation. En retenant que, par son courrier du 4 février 2011, l’administrateur avait simplement exercé son option de non-continuation des contrats en cours telle qu’elle résulte des dispositions de l’article L. 622-13 du code de commerce, sans rechercher, comme elle y était au demeurant invitée, si ce dernier n’avait pas précédemment opté pour la poursuite du contrat, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 622-13- II et V du code de commerce.

En l’absence de mise en demeure par le cocontractant, la renonciation de l’administrateur à la poursuite du contrat qu’il avait préalablement décidé de poursuivre n’entraîne pas la résiliation de plein droit de la convention à son initiative mais confère au seul cocontractant le droit de la faire prononcer en justice. Ayant relevé que l’administrateur avait exercé son option de non-continuation du contrat d’agent commercial liant M. X… à la société, la cour d’appel a exactement retenu que la lettre de l’administrateur du 4 février 2011 n’avait pu entraîner la rupture des relations contractuelles et que M. X…, se prétendant titulaire d’une créance indemnitaire résultant de la renonciation par l’administrateur à la poursuite du contrat, devait déclarer celle-ci au passif de la procédure collective.

 

  • Consommation – Contrat de cautionnement. Cass., Com., 1er mars 2016, N°14-16402.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032157853&fastReqId=1292070300&fastPos=177

Par un acte du 12 janvier 2006, la Société générale (la banque) a consenti à la société Audit comptable finances et services associés, devenue la société Agefor, un prêt pour l’acquisition des parts de la société d’expertise comptable Alirex, devenue la société Cabinet X… audit conseil (la société Cabinet X…). M. X… s’est, par un acte du 9 janvier 2006, auquel s’est substitué un acte du 29 mars 2007, rendu caution solidaire du remboursement de ce prêt. Une procédure de sauvegarde a été ouverte, le 24 mars 2009, à l’égard de la société Cabinet X… puis étendue, le 15 décembre 2009, à la société Agefor. Le 20 mai 2010, un plan de sauvegarde a été arrêté. Le 17 novembre 2010, la banque a assigné M. X… en exécution de son engagement. Le plan a été résolu par un jugement du 20 février 2012 qui a prononcé la liquidation judiciaire.

Pour apprécier si, au sens de l’article L. 341-4 du code de la consommation, le patrimoine de la caution lui permet de faire face à son obligation au moment où elle est appelée, le juge doit, en principe, se placer au jour où la caution est assignée. Cependant si, à ce moment, le débiteur principal bénéficie d’un plan de sauvegarde en cours d’exécution, l’appréciation doit être différée au jour où le plan n’est plus respecté, l’obligation de la caution n’étant exigible qu’en cas de défaillance du débiteur principal.

Pour condamner la caution à payer à la banque une certaine somme, l’arrêt retient que le jugement d’ouverture de la procédure de sauvegarde ne suspend les poursuites contre la caution que jusqu’au jugement arrêtant le plan de sauvegarde et que c’est donc à la date de l’assignation du 17 novembre 2010 délivrée à la caution par le créancier, qu’il convient de se placer pour apprécier la « disproportion », la caution ne pouvant se prévaloir des dispositions du plan pour échapper à ses obligations.

En se déterminant ainsi, sans constater qu’à la date retenue, le plan de sauvegarde du débiteur principal, dont la caution pouvait se prévaloir, n’était pas exécuté, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 626-11 du code de commerce et L. 341-4 du code de la consommation.

Il résulte de la combinaison des articles 1315 du code civil et L. 341-4 du code de la consommation qu’il incombe au créancier professionnel qui entend se prévaloir d’un contrat de cautionnement manifestement disproportionné lors de sa conclusion aux biens et revenus de la caution, personne physique, d’établir qu’au moment où il l’appelle, le patrimoine de celle-ci lui permet de faire face à son obligation.

Pour condamner la caution à payer à la banque une certaine somme, après avoir constaté la disproportion de son engagement, l’arrêt retient qu’il appartient à la caution de prouver que son patrimoine ne lui permet pas de faire face à son obligation au moment où elle est appelée.

En statuant ainsi, la cour d’appel a inversé la charge de la preuve et violé les textes susvisés.

 

Libertés publiques – Droit humanitaire et des étrangers

 

  • Aide médicale de l’Etat – Opportunité de l’aide. CE, 16 mars 2016, N° 381013,    1ère / 6ème SSR.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000032260311&fastReqId=1451510323&fastPos=1

L’article L. 251-1 du code de l’action sociale et des familles (CASF) distingue l’aide médicale de l’Etat accordée de droit, sous certaines conditions, aux étrangers résidant en France depuis plus de trois mois (1er alinéa) et celle que le ministre chargé de l’action sociale peut accorder aux personnes présentes sur le territoire français (2ème alinéa).

Il résulte des articles L. 251-1, L. 254-1 et L. 254-2 de ce code que les dispositions du deuxième alinéa de l’article L 251-1 du CASF doivent être interprétées comme permettant au ministre chargé de l’action sociale d’accorder le bénéfice de l’aide médicale de l’Etat à des personnes dont l’état de santé le justifie qui, ne résidant pas de manière ininterrompue sur le territoire national depuis plus de trois mois, ne bénéficient pas du droit prévu par les dispositions du premier alinéa du même article. A cette fin, le ministre dispose d’un large pouvoir pour apprécier, au regard de l’ensemble des circonstances de l’espèce, l’opportunité d’accorder une telle aide.

 

 

  • Assignation à résidence – Obligation de quitter le territoire français (OQTF). CE, 8 mars 2016 N° 397206, Référés.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000032189040&fastReqId=1451510323&fastPos=2

Une mesure d’assignation à résidence a pour objet de mettre à exécution la décision prononçant l’obligation de quitter le territoire français (OQTF) et ne peut être regardée comme constituant ou révélant une nouvelle OQTF, qui serait susceptible de faire l’objet d’une demande d’annulation….

Il appartient toutefois à l’administration de ne pas mettre à exécution l’OQTF si un changement dans les circonstances de droit ou de fait a pour conséquence de faire obstacle à la mesure d’éloignement.

Dans pareille hypothèse, l’étranger peut demander au président du tribunal administratif, sur le fondement du III de l’article L. 512-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), l’annulation de la décision l’assignant à résidence dans les quarante-huit heures suivant sa notification.

S’il n’appartient pas à ce juge de connaître de conclusions tendant à l’annulation de l’OQTF après que le juge saisi sur le fondement du I de l’article L. 512-1 de ce code a statué ou que le délai pour le saisir a expiré, il lui est loisible, le cas échéant, d’une part, de relever, dans sa décision, que l’intervention de nouvelles circonstances de fait ou de droit fait obstacle à l’exécution de l’OQTF et impose à l’autorité administrative de réexaminer la situation administrative de l’étranger, d’autre part, d’en tirer les conséquences en suspendant les effets de l’OQTF devenue, en l’état, inexécutable.

Il résulte des pouvoirs ainsi confiés au juge par les dispositions du I et du III de l’article L. 512-1 du CESEDA, des délais qui lui sont impartis pour se prononcer et des conditions de son intervention que la procédure spéciale prévue par le code présente des garanties au moins équivalentes à celles des procédures régies par le livre V du code de justice administrative (CJA). Ces procédures particulières sont exclusives de celles prévues par le livre V du CJA.

Il en va autrement dans le cas où les modalités selon lesquelles il est procédé à l’exécution d’une OQTF emportent des effets qui, en raison de changements dans les circonstances de droit ou de fait survenus depuis l’intervention de cette mesure et après que le juge, saisi sur le fondement soit du I, soit du III de l’article L. 512-1 du CESEDA, soit successivement des deux, a statué ou que le délai prévu pour le saisir a expiré, excèdent ceux qui s’attachent normalement à sa mise à exécution.

En l’espèce, Mme A…B…demandait au juge des référés, statuant sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, d’ordonner la suspension de l’exécution d’un arrêté préfectoral daté de juin 2015 portant obligation de quitter le territoire français à destination du pays dont elle a la nationalité, d’enjoindre à l’administration de procéder à un nouvel examen de sa situation et d’ordonner à l’administration de lui délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour.

 

 

Court of Justice of the European Union

 

  • Reference for a preliminary ruling — Area of freedom, security and justice — Judicial cooperation in civil matters — Regulation (EC) No 44/2001 — Contracts imposing an obligation on a Romanian undertaking to assign trade marks to an undertaking with its seat in a third country — Refusal — Clause conferring jurisdiction on a third country — Defendant entering an appearance before the Romanian courts without raising an objection — Applicable rules on jurisdiction. ECJ, 17 March 2016, Case C175/15,Taser International Inc. v. SC Gate 4 Business SRL, Cristian Mircea  Anastasiu.

http://curia.europa.eu/juris/liste.jsf?pro=&lgrec=en&nat=or&oqp=&dates=%2524type%253Dpro%2524mode%253DfromTo%2524from%253D2016.03.01%2524to%253D2016.03.31&lg=&language=en&jur=C&cit=none%252CC%252CCJ%252CR%252C2008E%252C%252C%252C%252C%252C%252C%252C%252C%252C%252Ctrue%252Cfalse%252Cfalse&td=%3BALL&pcs=Oor&avg=&page=2&mat=or&jge=&for=&cid=1036417#

Articles 23(5) and 24 of Council Regulation (EC) No 44/2001 of 22 December 2000 on jurisdiction and the recognition and enforcement of judgments in civil and commercial matters must be interpreted as meaning that, in a dispute concerning the non-performance of a contractual obligation, in which the applicant has brought proceedings before the courts of the Member State in which the defendant has its seat, the jurisdiction of those courts may stem from Article 24 of that regulation, where the defendant does not dispute their jurisdiction, even though the contract between the two parties contains a clause conferring jurisdiction on the courts of a third country.

Article 24 of Regulation No 44/2001 must be interpreted as precluding, in a dispute between parties to a contract which contains a clause conferring jurisdiction on the courts of a third country, the court of the Member State in which the defendant has its seat, which has been seized, from declaring of its own motion that it does not have jurisdiction, even though the defendant does not contest the jurisdiction of that court.

 

  • Air transport — Regulation (EC) No 261/2004 — Article 7 — Compensation payable to passengers in the event that their flight is cancelled or delayed by more than three hours — Article 16 — National bodies responsible for the enforcement of the regulation — Powers — Adoption of enforcement measures against the air carrier for payment of the compensation due to the passenger. ECJ, 17 March 2016, Joined Cases C145/15 and C146/15, K. Ruijssenaars, A. Jansen (C145/15), and J. H. Dees-Erf (C146/15).

http://curia.europa.eu/juris/liste.jsf?pro=&lgrec=en&nat=or&oqp=&dates=%2524type%253Dpro%2524mode%253DfromTo%2524from%253D2016.03.01%2524to%253D2016.03.31&lg=&language=en&jur=C&cit=none%252CC%252CCJ%252CR%252C2008E%252C%252C%252C%252C%252C%252C%252C%252C%252C%252Ctrue%252Cfalse%252Cfalse&td=%3BALL&pcs=Oor&avg=&page=2&mat=or&jge=&for=&cid=1037103#

Article 16 of Regulation (EC) No 261/2004 of the European Parliament and of the Council of 11 February 2004 establishing common rules on compensation and assistance to passengers in the event of denied boarding and of cancellation or long delay of flights, and repealing Regulation (EEC) No 295/91, must be interpreted as meaning that, where an individual complaint has been made by a passenger to the body designated by each Member State pursuant to Article 16(1) of the regulation following the refusal by an air carrier to pay to the passenger the compensation provided for in Article 7(1) of the regulation, that body is not required to take enforcement action against the carrier with a view to compelling it to pay the compensation.  

 

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