NEWSLETTER – JUIN 2018

NEWSLETTER – JUIN 2018

Droit du travail et sécurité sociale
Droits des affaires, concurrence, distribution et consommation
Libertés publiques – Droit humanitaire et des étrangers
Cour de Justice de l’Union Européenne

 

Droit du travail et sécurité sociale

  • Licenciement – Travaux publics – Convention collective. Cass., Soc., 11 avril 2018, N° 17-10899.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000036829603&fastReqId=1648799536&fastPos=26

La société Sodraco international a engagé M. Y… à compter du 2 février 2012 pour la durée du chantier de réalisation du terminal méthanier de Dunkerque. Ayant été licencié le 16 avril 2013, le salarié a saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes relatives à l’exécution et à la rupture du contrat de travail.

Le salarié fait grief à l’arrêt de dire que le licenciement a été prononcé pour une cause réelle et sérieuse et de le débouter de ses demandes relatives à la rupture du contrat de travail.

Selon l’article 7.10.1 de la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics du 15 décembre 1992, en cas de licenciements qui, à la fin d’un chantier, revêtent un caractère normal, selon la pratique habituelle et l’exercice régulier de la profession, en application de l’article L. 321-12 du code du travail, le chef d’entreprise ou son représentant informe et consulte les représentants du personnel (comité d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, délégués du personnel s’il en existe), dans un délai de quinze jours avant l’envoi des lettres de notification du licenciement aux salariés concernés. Cette information et cette consultation ont lieu au cours d’une réunion dont l’ordre du jour précise l’objet. A cette occasion, le chef d’entreprise ou son représentant remet aux représentants du personnel les indications suivantes :


– la date d’achèvement des tâches des salariés concernés ;


– le nombre de salariés concernés en distinguant ceux pouvant éventuellement être réembauchés sur un autre chantier, y compris en grand déplacement, par mutation ou reclassement interne ;


– le nombre de salariés dont le réemploi ne peut être assuré lors de l’achèvement des tâches qui leur étaient confiées, lorsque ces personnes ont été employées sur un ou plusieurs chantiers pendant une période continue inférieure à 18 mois ;


– le nombre de salariés engagés sur un chantier de longue durée dont le réemploi ne peut être assuré lors de l’achèvement sur ce chantier des tâches qui leur étaient confiées ;


– les mesures telles que recours à la formation professionnelle continue, susceptibles de permettre le reclassement des salariés dans l’entreprise ;


– les mesures envisagées pour faciliter le reclassement hors de l’entreprise des salariés qui devront être effectivement licenciés ;


– les salariés effectivement licenciés qui seront, avec leur accord, inscrits au répertoire des offres et demandes d’emploi (RODE) des travaux publics, afin de faciliter la recherche plus rapide d’un emploi dans les entreprises de la branche ;


Ces dispositions ne mettent à la charge de l’employeur aucune obligation de recherche de réemploi dans les entreprises du groupe dont il dépend.

Ayant constaté que l’employeur ne disposait d’aucun poste de réemploi à proposer au salarié en interne, la cour d’appel a fait une exacte application des dispositions conventionnelles en retenant que l’achèvement des tâches pour lesquelles le salarié avait été engagé constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement 

  • Indemnité compensatrice de congés payés – Calcul. Cass., Soc., 5 avril 2018, N°16-25428.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000036803193&fastReqId=1648799536&fastPos=44

Il résulte de l’application combinée des articles L. 1251-19, L. 3141-22 dans sa rédaction applicable en la cause et D. 3141-8 du code du travail que la détermination de la rémunération totale brute à laquelle se réfère l’article L. 1251-19 du code du travail pour le calcul de l’indemnité compensatrice de congés payés due par l’entreprise de travail temporaire au salarié intérimaire n’obéit à aucune spécificité autre que celle, prévue à l’article D. 3141-8, de l’inclusion dans son assiette de l’indemnité de fin de mission.

Mme Y… a été mise à disposition de la société Henkel Technologies France en qualité de chargée de clientèle, dans le cadre d’un contrat de travail temporaire par la société Manpower. Elle a saisi la formation de référé du conseil de prud’hommes en paiement de diverses sommes à titre d’indemnité de congés payés.

Pour condamner l’employeur à payer une certaine somme à titre de rappel d’indemnité de congés payés, l’ordonnance retient que les règles du droit commun du contrat de travail ne s’appliquent pas aux salariés intérimaires, qu’aux termes de l’article L. 1251-19 du code du travail, le montant de l’indemnité est calculé en fonction de la durée de la mission et ne peut être inférieur au dixième de la rémunération totale brute perçue par le salarié pendant la mission et que, selon la circulaire DRT n° 92-14 du 29 août 1992, doivent être intégrés dans la base de calcul de l’indemnité compensatrice de congés payés, outre l’indemnité de fin de mission, des primes et majorations diverses mais aussi des primes qui sont exclues de l’assiette des congés payés en droit commun, tels que le 13ème ou 14ème mois.

En statuant ainsi, alors que les primes allouées pour l’année entière, période de travail et période de congés confondues, n’ont pas à être incluses dans l’assiette de l’indemnité compensatrice de congés payés, le conseil de prud’hommes a violé les textes susvisés.

  • Prime de naissance – Conditions d’ouverture. Cass., Civ., 2ème, 4 avril 2018, N°17-17386.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000036803188&fastReqId=1648799536&fastPos=57

En vertu de l’article L. 512-1, alinéa 1er du code de la sécurité sociale, l’attribution des prestations familiales est subordonnée, sauf exception, à la résidence en France tant de l’allocataire que de l’enfant qui ouvre droit à leur bénéfice. Selon l’article R. 531-1 du même code, pour l’ouverture des droits à la prime à la naissance prévue par le deuxième, la situation de la famille est appréciée le premier jour du mois civil suivant le cinquième mois de la grossesse. Selon son article D. 531-2, II, alinéa 1er,  la prime à la naissance est versée avant la fin du dernier jour du mois civil suivant le sixième mois de la grossesse.

Mme X…, résidant en France et allocataire de la caisse d’allocations familiales de Paris (la caisse), a sollicité, le 15 juin 2012, le bénéfice de la prime à la naissance pour son enfant à naître, en indiquant le 1er décembre 2011 comme date de début de grossesse. La caisse a rejeté sa demande au motif qu’à la date d’appréciation fixée par l’article R. 531-1, alinéa 5, du code de la sécurité sociale, elle ne résidait pas en France et ne remplissait donc pas les conditions d’ouverture des droits à cette prestation. L’intéressée a saisi d’un recours une juridiction de sécurité sociale.

Pour rejeter ce recours, l’arrêt retient qu’aux termes de l’article R. 531-1, alinéa 5, du code de la sécurité sociale, pour l’ouverture des droits à la prime à la naissance, la situation de la famille est appréciée au premier jour du mois civil suivant le cinquième mois de grossesse, que les conditions d’attribution de la prime à la naissance doivent donc être réunies à cette date et notamment celle imposant au bénéficiaire des prestations familiales de résider en France et qu’en l’espèce, les parties s’accordent pour reconnaître qu’à la date prévue par l’article R. 531-1, Mme X… vivait toujours en Algérie.

En statuant ainsi, alors que l’appréciation de la situation de la famille pour l’ouverture des droits au bénéfice de la prime à la naissance n’est pas soumise à la condition de résidence de l’allocataire en France, laquelle ne s’applique qu’à la date du versement effectif de la prestation, la cour d’appel a violé les articles L. 512-1, alinéa 1er, L. 531-2, R. 531-1, dernier alinéa et D. 531-2, II, alinéa 1er du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige.

  • Comité d’entreprise – Besoins d’intérêt général. Cass., Soc., 4 avril 2018, N° 18-70002 (Avis).

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000036803197&fastReqId=1648799536&fastPos=63

Vu les articles L. 441-1 et suivants du code de l’organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile ;

Vu la demande d’avis formulée le 17 janvier 2018 et rectifiée le 24 janvier 2018 par le tribunal de grande instance de Nanterre, reçue le 22 janvier 2018 et le 30 janvier 2018, dans une instance opposant le comité d’établissement des Etablissements FCES de Perpignan, de Salle d’Aude et de Gruissan à la fondation Partage et Vie, et ainsi libellée :


“Un comité d’entreprise d’une personne morale, soumise à l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics en qualité de pouvoir adjudicateur, est-il considéré comme ayant été créé pour satisfaire spécifiquement à des besoins d’intérêt général au sens de l’article 10 de ladite ordonnance ?”

MOTIFS :

Selon la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJCE, arrêt du 27 février 2003, Adolph X…, C-373/00, point 50 ; CJCE, arrêt du 10 avril 2008, Ing. Aigner, C-393/06, point 40) constituent des besoins d’intérêt général des besoins que l’État choisit de satisfaire lui-même ou à l’égard desquels il entend conserver une influence déterminante.

Aux termes de l’article L. 2323-1, alinéa 1, du code du travail, alors applicable, le comité d’entreprise a pour objet d’assurer une expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décisions relatives à la gestion et à l’évolution économique et financière de l’entreprise, à l’organisation du travail, à la formation professionnelle et aux techniques de production.

Eu égard à la mission du comité d’entreprise définie par cette disposition, le comité d’entreprise ne relève pas des personnes morales de droit privé créées pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général au sens de l’article 10 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics, quand bien même il exerce sa mission au sein d’une personne morale visée audit article.

En conséquence,

EST D’AVIS QUE :

Un comité d’entreprise d’une personne morale, soumise à l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics en qualité de pouvoir adjudicateur, ne relève pas des personnes morales de droit privé créées pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général au sens de l’article 10 de ladite ordonnance.

  • Arrêt-maladie – Indemnités journalières. Cass., Civ., 2ème, 4 avril 2018, N° 17-14961.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000036803187&fastReqId=1648799536&fastPos=65

M. X… a bénéficié de prolongations d’arrêt de travail du 23 février au 10 juin 2015. La caisse du régime social des indépendants des Alpes (la caisse) ayant refusé de lui verser les indemnités journalières de l’assurance maladie au titre de cette période, l’intéressé a saisi d’un recours une juridiction de sécurité sociale.

M.X… fait grief à l’arrêt de le débouter de son recours, alors, selon le moyen, que la loi ne dispose que pour l’avenir et n’a point d’effet rétroactif. Par ailleurs, les conditions d’ouverture du droit aux prestations sociales sont appréciées au jour de la constatation médicale de l’incapacité de travail. Enfin, le décret n° 2015-101 du 2 février 2015 est entré en vigueur, s’agissant de la modification des droits des assurés en cas d’arrêt de travail, à compter du 4 février 2015. En considérant que la date à prendre en considération pour apprécier si les droits de M. X… se trouvaient modifiés par l’entrée en vigueur de ce décret était celle du point de départ de chacune des périodes de prolongation litigieuses, postérieures au 4 février 2015, cependant que la seule date pertinente était celle de l’arrêt de travail initial, à savoir celle du 14 juin 2014, dès lors que M. X… s’est trouvé sans interruption en arrêt de travail depuis cette date, de sorte que les disposition du décret du 2 février 2015 n’étaient pas applicables à sa situation, le tribunal des affaires de sécurité sociale a violé l’article 2 du code civil, outre l’article 2 du décret n° 2015-101 du 2 février 2015 et l’article D. 613-19 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable en l’espèce.

Les dispositions du décret n° 2015-101 du 2 février 2015 qui modifient les règles de calcul des prestations en espèces servies au titre de l’assurance maladie du régime des travailleurs indépendants des professions non agricoles s’appliquent, aux termes de son article 2, aux indemnités journalières versées à l’occasion d’arrêts de travail débutant à compter du lendemain de la publication du décret. Procédant d’une nouvelle prescription médicale, une prolongation de l’arrêt de travail constitue un arrêt de travail distinct.

Ayant relevé que M. X…, placé en arrêt maladie le 14 juin 2014, a bénéficié de plusieurs prolongations constitutives à chaque fois de nouveaux arrêts puisque soumis à appréciation médicale, et que, dès lors, les dispositions du décret susmentionné s’appliquent bien à sa situation, à compter de la première prolongation postérieure à sa parution, soit le 23 février 2015, et constaté que M. X… ne conteste pas qu’en vertu du nouveau calcul, ses revenus sont inférieurs au plancher lui permettant de percevoir des prestations, le tribunal en a exactement déduit que M. X… ne pouvait pas bénéficier des indemnités journalières pour la période courant du 23 février au 10 juin 2015.

  • Allocation aux adultes handicapés et complément de ressources – Calcul des ressources. Cass., Civ., 2ème, 4 avril 2018, N° 17-15049.                                

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000036803183&fastReqId=590097643&fastPos=1

Selon l’article R. 821-4-4 du code de la sécurité sociale qui s’applique par dérogation à la règle de périodicité retenue pour l’appréciation des conditions de revenus prévue par les articles R. 821-4 et R. 821-4-1 du même code, qu’au cas où un allocataire, son conjoint, concubin ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité a cessé toute activité professionnelle ou à caractère professionnel sans revenu de remplacement, ses ressources sont appréciées en ne tenant pas compte des revenus d’activité professionnelle ou à caractère professionnel ni des indemnités de chômage perçues par l’intéressé pendant l’année civile de référence. Cette mesure s’applique à compter du premier jour du mois civil suivant celui au cours duquel est intervenu le changement de situation et jusqu’au dernier jour du mois civil précédant celui de la reprise d’une activité professionnelle ou à caractère professionnel par l’intéressé.

La caisse d’allocations familiales de Haute-Loire ayant notifié à E… X…, qui vivait avec M. Y…, que les droits à l’allocation aux adultes handicapés et au complément de ressources dont elle bénéficiait depuis le 1er juillet 2000, seraient supprimés à compter du mois de janvier 2015 en raison d’un dépassement du plafond de ressources du foyer, l’intéressée a saisi d’un recours une juridiction de sécurité sociale. A  son décès survenu le […], ses héritiers ont repris l’instance.

Pour rejeter le recours, l’arrêt énonce que, même en neutralisant la période d’inactivité de M. Y… du 1er novembre à la fin du mois de décembre 2013, terme de la période de référence, les revenus conjugués du couple étaient malgré tout supérieurs au plafond.

En statuant ainsi, alors qu’elle constatait que M. Y… était dépourvu d’emploi comme de revenu de remplacement depuis le 18 octobre de l’année civile de référence, de sorte qu’en raison de ce changement de situation, pris en considération à partir du 1er novembre, l’ensemble des revenus d’activité professionnelle perçus par l’intéressé au cours de l’année considérée n’entrait plus dans le calcul des ressources du foyer, la cour d’appel a violé le texte susvisé.

 

Droits des affaires, concurrence, distribution et consommation

  • Vente commerciale – Crédit-bail mobilier. Cass., Ch. Mixte, 13 avril 2018, N° 16-21345.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000036829604&fastReqId=2048318365&fastPos=1

Le 10 mai 2010, la société Aptibois a commandé un camion équipé d’un plateau et d’une grue à la société LPL 77. Le bon de commande prévoyait que la charge utile restante du véhicule devait être de huit cent cinquante kilogrammes au minimum. Pour l’acquisition de ce véhicule, la société Aptibois a conclu, le 3 juin 2010, avec la banque, un contrat de crédit-bail mobilier prévoyant le versement de quatre-vingt-quatre loyers mensuels. Le camion a été livré avec une carte grise et un procès-verbal de contrôle de conformité initial délivré, le 20 septembre 2010, par la société Gonnet hydraulique, faisant apparaître une charge utile conforme à la commande et à la plaque administrative. Le 19 octobre 2010, la société LPL 77 a adressé sa facture à la banque. Une pesée après déchargement, consécutive à un contrôle de police, et un procès-verbal de constat dressé par un huissier de justice ayant révélé que le poids à vide du véhicule était supérieur à celui indiqué sur le certificat d’immatriculation et que la charge disponible était inférieure à celle contractuellement prévue, la société Aptibois a assigné la société LPL 77, qu’elle avait vainement mise en demeure de résoudre le problème, ainsi que la banque, en nullité de la vente et du contrat de crédit-bail et en restitution des loyers versés. La société LPL 77 a appelé en garantie la société Gonnet hydraulique.

Ayant relevé que le véhicule livré à la société Aptibois n’était pas conforme aux spécifications prévues au bon de commande en ce que la charge utile restante était inférieure à huit cent cinquante kilogrammes, malgré les indications contraires figurant sur les documents, la cour d’appel, procédant à la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision de prononcer la résolution de la vente.

La Cour de cassation jugeait jusqu’à présent que la résolution du contrat de vente entraînait nécessairement la résiliation du contrat de crédit-bail, sous réserve de l’application de clauses ayant pour objet de régler les conséquences de cette résiliation (Ch. mixte., 23 novembre 1990, pourvois n° 86-19.396, n° 88-16.883 et n° 87-17.044, Bull. 1990, Ch. mixte, n° 1 et 2 ; Com., 12 octobre 1993, pourvoi n° 91-17.621, Bull. 1993, IV, n° 327 ; Com., 28 janvier 2003, pourvoi n° 01-00.330 ; Com., 14 décembre 2010, pourvoi n° 09-15.992).

Par ailleurs, il a été jugé que les contrats concomitants ou successifs qui s’inscrivent dans une opération incluant une location financière sont interdépendants (Ch. mixte, 17 mai 2013, pourvois n° 11-22.768 et n° 11-22.927, Bull. 2013, Ch. mixte, n° 1) et que l’anéantissement de l’un quelconque d’entre eux entraîne la caducité, par voie de conséquence, des autres (Com., 12 juillet 2017, pourvoi n° 15-27.703, publié).

Si cette dernière jurisprudence n’est pas transposable au contrat de crédit-bail mobilier, accessoire au contrat de vente, la caducité qu’elle prévoit, qui n’affecte pas la formation du contrat et peut intervenir à un moment où celui-ci a reçu un commencement d’exécution, et qui diffère de la résolution et de la résiliation en ce qu’elle ne sanctionne pas une inexécution du contrat de crédit-bail mais la disparition de l’un de ses éléments essentiels, à savoir le contrat principal en considération duquel il a été conclu, constitue la mesure adaptée.

Il y a lieu, dès lors, modifiant la jurisprudence, de décider que la résolution du contrat de vente entraîne, par voie de conséquence, la caducité, à la date d’effet de la résolution, du contrat de crédit-bail et que sont inapplicables les clauses prévues en cas de résiliation du contrat.

C’est donc à bon droit que la cour d’appel a retenu que le crédit-preneur devait restituer le véhicule à la banque et que celle-ci, qui ne pouvait pas se prévaloir des clauses contractuelles de garantie et de renonciation à recours, devait lui restituer les loyers perçus en exécution du contrat de crédit-bail.

Par cet arrêt, la Cour de cassation considère que la résolution du contrat de vente entraîne la caducité du contrat de crédit-bail et non pas sa résolution ou sa résiliation. Le contrat de crédit-bail mobilier, prévu à l’article L. 313-7 du code monétaire et financier, est un contrat de louage d’un matériel professionnel, qui permet au preneur de jouir immédiatement du bien en contrepartie du paiement d’un loyer, assorti d’une promesse unilatérale de vente (option d’achat) qui permet au locataire d’accéder à la propriété du bien en fin de contrat pour un prix déterminé à l’avance et prenant pour partie en compte les loyers versés. Ce mode de financement coexiste avec la location financière mais s’en distingue en ce que celle-ci ne comprend pas d’option d’achat. La location financière concerne des biens que l’utilisateur n’envisage pas d’acquérir car ils deviennent rapidement obsolètes, comme le matériel informatique. La durée du contrat est irrévocable et celui-ci n’est pas soumis à la réglementation bancaire. La Chambre mixte a précisé que la caducité intervenait à la date d’effet de la résolution, laquelle est le plus souvent la date de conclusion du contrat de vente, sauf notamment les cas où le contrat se réalise par tranches et où la caducité pourra être constatée à une date postérieure à celle de la conclusion du contrat. Elle en a tiré pour conséquence que les clauses prévues en cas de résiliation du contrat étaient inapplicables et que la banque devait restituer au crédit-preneur les loyers que celui-ci lui avait versés.

  • Bail commercial – Loyer. Cass., Civ., 3ème, 12 avril 2018, N°16-26514.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000036829595&fastReqId=234759669&fastPos=4

Le 24 juin 2009, la société Immobilière Lacroix a signifié à la société Celimat un congé avec offre de renouvellement, à compter du 1er janvier 2010, du bail commercial portant sur une boutique à usage de bijouterie-horlogerie, moyennant un loyer fixé selon la valeur locative du bien. Le 17 août 2011, elle a assigné la locataire en fixation du loyer déplafonné à une certaine somme, avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance et au plus tard à compter de l’assignation.

Les  revenus échus, tels que fermages, loyers, arrérages de rentes perpétuelles ou viagères, produisent intérêt du jour de la demande ou de la convention.

Pour rejeter la demande de la bailleresse au titre des intérêts et de la capitalisation, l’arrêt retient que le bail est assorti d’une clause d’échelle mobile permettant la variation automatique du loyer de nature à éviter que se crée un différentiel de loyer tel qu’il résulte de la présente fixation par rapport au loyer fixé au bail expiré.

En statuant ainsi, après avoir fixé à une certaine somme le loyer du bail renouvelé, alors que les intérêts dus sur la différence entre le loyer du bail renouvelé et le loyer payé depuis le renouvellement courent, en l’absence de convention contraire, à compter de la délivrance de l’assignation en fixation du prix, la cour d’appel a violé l’article 1155 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016.

  • Crédit-bail immobilier – Résiliation. Cass., Com., 11 avril 2018, N°16-24143.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000036829602&fastReqId=1648799536&fastPos=33

Par un acte notarié du 14 février 2006, la société Sofimurs, aux droits de laquelle vient la société HSBC Real Estate Leasing (le crédit-bailleur), a consenti à la société d’exploitation des eaux de Monteux La Source (le crédit-preneur) un crédit-bail immobilier d’une durée de quinze ans, pour l’acquisition d’un terrain et la construction d’un immeuble à usage industriel, garanti, jusqu’à un certain montant, par le cautionnement solidaire de M. X…

Le 24 juillet 2009, le crédit-preneur a été mis en redressement judiciaire, procédure convertie le 31 mars 2010 en liquidation judiciaire. Le 1er avril 2010, le liquidateur a résilié le contrat de crédit-bail immobilier. Le crédit-bailleur a déclaré une créance comprenant une indemnité de résiliation en soutenant qu’elle était due en raison de l’exercice du choix de résilier le contrat. Assignée en paiement, la caution a contesté être tenue au paiement de cette indemnité en raison de la déchéance du droit du crédit-bailleur de percevoir une telle pénalité résultant de son manquement à ses obligations d’information prévues par les articles L. 341-1 et L. 341-6 du code de la consommation.

Pour condamner la caution à payer au crédit-bailleur une somme correspondant aux seuls loyers impayés, outre intérêts, l’arrêt, après avoir constaté que le crédit-bailleur ne justifiait avoir adressé à la caution ni l’information dans le mois des incidents de paiement non régularisés de janvier à juin 2010 de la société débitrice principale et dans le mois de la résiliation, ni l’information annuelle de l’article L. 341-6 du code de la consommation, retient qu’il y a lieu de prononcer la déchéance des intérêts contractuels et la décharge des pénalités et intérêts de retard, laquelle s’étend à l’indemnité de résiliation, devenue exigible le 1er avril 2010, jour où le liquidateur a résilié le contrat, dans la mesure où cette indemnité forfaitaire prévue au contrat constitue une pénalité.

En statuant ainsi, alors que, même fixée de manière forfaitaire, l’indemnité de résiliation due en cas d’exercice du droit de résilier le contrat de manière anticipée conféré au crédit-preneur en application de l’article L.313-9, alinéa 2, du code monétaire et financier, ou à son liquidateur en application de l’article L. 641-11-1, II, et III, 3°, dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 18 décembre 2008, ne constitue pas une pénalité au sens des articles L. 341-1 et L. 341-6 du code de la consommation, mais a pour objet de réparer le préjudice subi par le crédit-bailleur du fait de l’exercice par le crédit-preneur de sa faculté de résiliation anticipée du contrat, la cour d’appel a violé les articles L. 341-1 et L. 341-6 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 14 mars 2016.

L’indemnité de résiliation due en cas d’exercice du droit de résilier un contrat de crédit-bail de manière anticipée ne constitue pas une pénalité au sens des articles L. 341-1 et L. 341-6 du code de la consommation dans leur rédaction antérieure à l’ordonnance du 14 mars 2016, mais a pour objet de réparer le préjudice subi par le crédit-bailleur du fait de l’exercice par le crédit-preneur de sa faculté de résiliation anticipée du contrat.

  • Consommation – Crédit renouvelable. Cass., Civ., 1ère, 6 avril 2018, N°18-70001 (Avis).

Vu les articles L. 441-1 et suivants du code de l’organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile ;

Vu la demande d’avis formulée, le 12 décembre 2017, par le tribunal d’instance de Villefranche-sur-Saône, ainsi libellée :


“-L’article L. 312-57 du code de la consommation doit-il être interprété en ce sens qu’il permet de qualifier de “crédit renouvelable par fractions” un contrat qui, s’il définit un montant maximal d’emprunts accordés à un consommateur, suppose lors de chacun des emprunts successifs, remboursable indépendamment des autres, à un taux fixe qui lui est propre, une négociation quant à ses clauses essentielles, de durée de remboursement, et du taux d’intérêts conventionnels fixe spécifique ?


-Dans la négative, chacun des emprunts opéré s’analyse-t-il en un prêt, personnel ou affecté, justifiant de l’acceptation d’une offre préalable, ouvrant droit à rétractation ?” ;


Vu les observations écrites de Me Le Prado pour la Caisse de crédit mutuel de Saint-Priest ;

MOTIFS:

I – Sur la recevabilité de la demande d’avis, contestée par la banque :


Il résulte de l’article L. 441-1 du code de l’organisation judiciaire que la demande d’avis doit porter sur une question de pur droit commandant l’issue du litige, être nouvelle, présenter une difficulté sérieuse et se poser dans de nombreux litiges.

En premier lieu, la demande d’avis a été présentée à l’occasion d’un procès en cours et porte sur une règle de droit qui commande l’issue du litige afférent à la qualification d’un contrat dénommé Passeport crédit conclu le 5 janvier 2012, au regard des dispositions du code de la consommation régissant le contrat de crédit renouvelable.

En effet, si l’article L. 312-57 du code de la consommation a été créé par l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, ce texte reprend néanmoins la définition énoncée à l’article L. 311-16 du même code, en vigueur lors de la conclusion du contrat, selon laquelle constitue un crédit renouvelable une ouverture de crédit qui, assortie ou non de l’usage d’une carte de crédit, offre à son bénéficiaire la possibilité de disposer de façon fractionnée, aux dates de son choix, du montant du crédit consenti.

En deuxième lieu, la Cour de cassation n’a ni statué ni rendu un avis relatif au point de droit sur lequel son avis est sollicité et aucun pourvoi en cours ne pose la question faisant l’objet de la demande.

 

En dernier lieu, la question a fait l’objet de nombreuses décisions divergentes des juridictions du fond.

La demande d’avis est donc recevable.


II- Sur le fond :


Il résulte des dispositions de l’article L. 311-16 du code de la consommation alors en vigueur, que le crédit renouvelable, qu’il soit ou non assorti de l’usage d’une carte de crédit, consiste en la possibilité de bénéficier d’un crédit, d’un montant déterminé dès l’origine, et dont l’utilisation s’effectue de façon fractionnée, aux dates choisies par son bénéficiaire. L’établissement d’un contrat est obligatoire pour la conclusion du crédit initial qui est limité à un an et, dans les mêmes conditions, pour toute augmentation du crédit consentie ultérieurement.


Le crédit renouvelable est un crédit dont le taux d’intérêt est révisable. Un changement de taux d’intérêt peut donc intervenir en cours d’exécution du contrat. Cependant, toute modification du taux est soumise à une information préalable de l’emprunteur, ce qui lui confère le droit de refuser cette modification. Un taux révisable varie à la hausse ou à la baisse, soit selon des indices extérieurs, soit selon le taux de base du prêteur. Les conditions de révision sont précisées dans l’offre de prêt.

Le contrat de crédit renouvelable permet à l’emprunteur de reconstituer le crédit utilisé, à la différence du crédit affecté qui est destiné au financement de l’acquisition de biens particuliers.


Il s’ensuit que ne peut recevoir la qualification de crédit renouvelable un contrat, tel que le Passeport crédit, qui permet de souscrire plusieurs emprunts distincts, combinant la faculté de reconstitution du crédit permanent avec les modalités de remboursement par échéances prédéterminées suivant un tableau d’amortissement établi lors de chaque emprunt d’une fraction de capital disponible, comportant un taux fixe spécifique selon l’affectation des fonds prêtés, et ne prévoyant qu’une acceptation unique donnée par l’emprunteur lors de sa conclusion.


Dans ces conditions, chacun des emprunts doit s’analyser en un prêt personnel ou affecté.


En conséquence,


LA COUR EST D’AVIS QUE :


1°/ L’article L. 312-57 du code de la consommation, en ce qu’il reprend la définition énoncée à l’article L. 311-16 du même code, en vigueur lors de la conclusion du contrat, doit être interprété en ce sens qu’il ne permet pas de qualifier de “crédit renouvelable par fractions” un contrat qui, s’il définit un montant maximal d’emprunts accordés à un consommateur, suppose lors de chacun des emprunts successifs, remboursable indépendamment des autres, à un taux fixe qui lui est propre, une négociation quant à ses clauses essentielles, de durée de remboursement, et du taux d’intérêts conventionnels fixe spécifique.


2°/ Chacun des emprunts s’analyse en un prêt, personnel ou affecté, justifiant de l’acceptation d’une offre préalable, ouvrant notamment droit à rétractation.

  • Consommation – Assurance de groupe. Cass., Civ., 1ère, 5 avril 2018, N° 13-27063.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000036803178&fastReqId=1648799536&fastPos=54

M. et Mme X… ont contracté auprès de la société Crédit agricole des Savoie, devenue la caisse régionale de Crédit agricole mutuel des Savoie (la banque), par acte authentique du 19 mars 1997, un prêt immobilier et un second prêt, selon offre du 4 mai 1999. M. X…, alors conducteur de poids lourds, a, pour ces deux prêts, adhéré au contrat d’assurance de groupe proposé par la banque auprès de la société Caisse nationale de prévoyance, CNP assurances (l’assureur), comprenant la couverture des risques décès, invalidité permanente et absolue, incapacité temporaire totale. Ayant été placé en arrêt de travail à compter du 25 mai 2004, M. X… a bénéficié de la prise en charge par l’assureur des échéances des deux prêts jusqu’au 1er février 2007, date à laquelle il a été estimé, par le médecin conseil de l’assureur, apte à l’exercice d’une activité professionnelle statique. M. X… a assigné l’assureur en garantie.

Le souscripteur d’une assurance de groupe ne s’acquitte de son obligation d’information à l’égard de l’adhérent qu’en annexant au contrat de prêt une notice spécifique, distincte de tous autres documents contractuels ou précontractuels, définissant de façon claire et précise les risques garantis et les modalités de la mise en jeu de l’assurance.

Pour dire que M. X… ne peut bénéficier, au-delà du 1er février 2007, de l’assurance de groupe « incapacité totale et définitive » souscrite par le prêteur auprès de l’assureur et à laquelle il a adhéré le 19 mars 1997, l’arrêt retient qu’il a paraphé les conditions générales du contrat d’assurance, qu’il ne conteste pas que ce document lui a été remis, et que, s’il soutient qu’aucune notice distincte des conditions générales ou particulières ne lui a été délivrée ni n’a été annexée au contrat de prêt, cette exigence ajoute à la loi une condition de forme qu’elle ne prévoit pas.

En statuant ainsi, la cour d’appel a violé l’article L. 312-9 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010.

Aux termes de l’article L. 311-12 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003, lorsque l’offre préalable est assortie d’une proposition d’assurance, une notice doit être remise à l’emprunteur, qui comporte les extraits des conditions générales de l’assurance le concernant, notamment les nom et adresse de l’assureur, la durée, les risques couverts et ceux qui sont exclus.

Pour dire que M. X… ne peut bénéficier, au- delà du 1er février 2007, de l’assurance de groupe « incapacité totale et définitive » souscrite par le prêteur auprès de l’assureur, l’arrêt retient que, sur la demande d’adhésion datée du 14 avril 1999, M. et Mme X… ont indiqué avoir reçu un exemplaire des conditions générales et particulières valant notice d’assurance dont ils ont attesté avoir pris connaissance et qu’ainsi, les prescriptions de l’article L. 311-12 du code de la consommation ont été respectées.

En statuant ainsi, alors que la remise des conditions générales et particulières du contrat ne pouvait suppléer le défaut de remise de la notice, la cour d’appel a violé le texte susvisé.

 

Libertés publiques – Droit humanitaire et des étrangers

  • Etrangers – Rétention administrative. CE, 16 avril 2018, Référés, N° 419373.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000036821101&fastReqId=664881622&fastPos=4

L’entrée en vigueur des dispositions de la loi n° 2018-187 du 20 mars 2018 relatives à la rétention administrative des étrangers faisant l’objet d’une décision de transfert ou d’une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge ne saurait être regardée comme subordonnée à l’intervention du décret précisant les modalités de prise en compte de la vulnérabilité et, le cas échéant, des besoins particuliers des étrangers placés en rétention. Ainsi, en demandant aux préfets d’appliquer ces dispositions, et donc de placer en rétention administrative les étrangers en instance de transfert pour lesquels il existerait un risque non négligeable de fuite, le ministre de l’intérieur n’a pas porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.

  • Etrangers – Assignation à résidence. CE, 11 avril 2018, 2ème – 7ème réunies, N°15174.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000036791239&fastReqId=1981614581&fastPos=7

Les décisions par lesquelles le préfet assigne à résidence, sur le fondement de l’article L. 561-2 du CESEDA, les étrangers faisant l’objet d’une mesure de transfert en application de l’article L. 742-3 du même code peuvent être prononcées à l’égard des étrangers qui ne disposent que d’une simple domiciliation postale. L’indication dans de telles décisions d’une adresse qui correspond uniquement à une domiciliation postale ne saurait imposer à l’intéressé de demeurer à cette adresse.

Une mesure d’assignation à résidence prise en application de l’article L. 561-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) consiste, pour l’autorité administrative qui la prononce, à déterminer un périmètre que l’étranger ne peut quitter et au sein duquel il est autorisé à circuler et, afin de s’assurer du respect de cette obligation, à lui imposer de se présenter, selon une périodicité déterminée, aux services de police ou aux unités de gendarmerie. Une telle mesure n’a pas, en dehors des hypothèses où elle inclut une astreinte à domicile pour une durée limitée, pour effet d’obliger celui qui en fait l’objet à demeurer à son domicile

Dès lors, les décisions par lesquelles le préfet assigne à résidence, sur le fondement de l’article L. 561-2 du CESEDA, les étrangers faisant l’objet d’une mesure de transfert en application de l’article L. 742-3 du même code peuvent être prononcées à l’égard des étrangers qui ne disposent que d’une simple domiciliation postale. L’indication dans de telles décisions d’une adresse qui correspond uniquement à une domiciliation postale ne saurait imposer à l’intéressé de demeurer à cette adresse.

  • Etrangers – Mouvements transfrontaliers. CE, 11 avril 2018, 10ème – 9ème Réunies, N° 410897.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000036791213&fastReqId=280997745&fastPos=6

Conformément à l’article 8 du règlement (UE) 2016/399, le mouvement transfrontalier des ressortissants des pays tiers aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne fait l’objet d’une vérification approfondie portant sur les éléments énumérés au 3 de cet article, au nombre desquels figure, à l’entrée, la vérification que le ressortissant de pays tiers est en possession, pour franchir la frontière, d’un document valable et qui n’est pas arrivé à expiration, et que ce document est accompagné, le cas échéant, du visa ou du permis de séjour requis.

En l’espèce, il appartenait ainsi aux fonctionnaires de police chargés du contrôle aux frontières de s’assurer, comme ils l’ont fait, que l’intéressée, de nationalité congolaise et titulaire d’un visa Schengen de type C court, était bien en possession d’un document valable pour franchir la frontière en provenance d’un Etat tiers à l’Union européenne. La décision de refus d’entrée en France du 19 janvier 2018 était fondée, en application des articles L. 211-2 et L. 213-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), sur l’invalidité du passeport de l’intéressée et reposait, sans illégalité manifeste, sur l’indication donnée par la note verbale adressée par le ministère des affaires étrangères de la République démocratique du Congo, selon laquelle, seuls sont valables pour les ressortissants de cet Etat, à compter du 14 janvier 2018, les passeports biométriques délivrés après le 15 décembre 2015.

La liberté d’aller et venir, composante de la liberté personnelle protégée par les articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, constitue une liberté fondamentale au sens de l’article L. 521-2 du code de justice administrative. Elle s’exerce, en ce qui concerne le franchissement des frontières, dans les limites découlant de la souveraineté de l’Etat et des accords internationaux et n’ouvre pas aux étrangers un droit général et absolu d’accès sur le territoire français. Celui-ci est en effet subordonné au respect tant de la législation et de la réglementation en vigueur que des règles qui résultent des engagements européens et internationaux de la France.

 

European Court of Justice

  • Reference for a preliminary ruling — Border control, asylum, immigration — Article 20 TFEU — Charter of Fundamental Rights of the European Union — Articles 7 and 24 — Directive 2008/115/EC — Articles 5 and 11 — Third-country national subject to an entry ban — Application for residence for the purposes of family reunification with a Union citizen who has not exercised freedom of movement — Refusal to examine the application. ECJ, 8 May 2018, Case C-82/16, A. and Others v Belgische Staat.

http://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?text=&docid=201821&pageIndex=0&doclang=en&mode=lst&dir=&occ=first&part=1&cid=845479

  1. Directive 2008/115/EC of the European Parliament and of the Council of 16 December 2008 on common standards and procedures in Member States for returning illegally staying third-country nationals, in particular Articles 5 and 11 thereof, must be interpreted as not precluding a practice of a Member State that consists in not examining an application for residence for the purposes of family reunification, submitted on its territory by a third-country national family member of a Union citizen who is a national of that Member State and who has never exercised his or her right to freedom of movement, solely on the ground that that third-country national is the subject of a ban on entering the territory of that Member State.
  1. Article 20 TFEU must be interpreted as meaning that:
    –        a practice of a Member State that consists in not examining such an application solely on the ground stated above, without any examination of whether there exists a relationship of dependency between that Union citizen and that third-country national of such a nature that, in the event of a refusal to grant a derived right of residence to the third-country national, the Union citizen would, in practice, be compelled to leave the territory of the European Union as a whole and thereby be deprived of the genuine enjoyment of the substance of the rights conferred by that status, is precluded;
    –        where the Union citizen is an adult, a relationship of dependency, capable of justifying the grant, to the third-country national concerned, of a derived right of residence under Article 20 TFEU, is conceivable only in exceptional cases, where, in the light of all the relevant circumstances, any form of separation of the individual concerned from the member of his family on whom he is dependent is not possible;
    –        where the Union citizen is a minor, the assessment of the existence of such a relationship of dependency must be based on consideration, in the best interests of the child, of all the specific circumstances, including the age of the child, the child’s physical and emotional development, the extent of his emotional ties to each of his parents, and the risks which separation from the third-country national parent might entail for that child’s equilibrium; the existence of a family link with that third-country national, whether natural or legal, is not sufficient, and cohabitation with that third-country national is not necessary in order to establish such a relationship of dependency;
    –        it is immaterial that the relationship of dependency relied on by a third-country national in support of his application for residence for the purposes of family reunification comes into being after the imposition on him of an entry ban;
    –        it is immaterial that the entry ban imposed on the third-country national has become final at the time when he submits his application for residence for the purposes of family reunification; and
    –        it is immaterial that an entry ban, imposed on a third-country national who has submitted an application for residence for the purposes of family reunification, may be justified by non-compliance with an obligation to return; where such a ban is justified on public policy grounds, such grounds may permit a refusal to grant that third-country national a derived right of residence under Article 20 TFEU only if it is apparent from a specific assessment of all the circumstances of the individual case, in the light of the principle of proportionality, the best interests of any child or children concerned and fundamental rights, that the person concerned represents a genuine, present, and sufficiently serious threat to public policy.
  1. Article 5 of Directive 2008/115 must be interpreted as precluding a national practice pursuant to which a return decision is adopted with respect to a third-country national, who has previously been the subject of a return decision, accompanied by an entry ban that remains in force, without any account being taken of the details of his or her family life, and in particular the interests of a minor child of that third-country national, referred to in an application for residence for the purposes of family reunification submitted after the adoption of such an entry ban, unless such details could have been provided earlier by the person concerned.

 

 

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